A la date de la création de l’Organisation des Nations unies en 1945, seulement cinq Etats arabes avaient signé la Charte fondatrice de l'ONU, tandis que les autres pays étaient soumis au joug de la colonisation occidentale.
La situation a grandement changé aujourd'hui et l'obtention par les Arabes d'un siège permanent au sein du Conseil de sécurité est devenu une requête officielle.
Actuellement, les Nations unies comptent dans leurs rangs 21 Etats arabes membres, à l'exception de la Palestine qui a été reconnue par l'Assemblée générale de l’ONU, en 2012, comme Etat non-membre.
Ainsi, le nombre des pays arabes aux Nations unies a quadruplé, depuis sa création le 24 octobre 1945, de même que le nombre des pays membres de l'ONU a également quadruplé, passant de 51, il y a de cela 77 ans, à 193 Etats en 2022.
Créée sur les décombres de la Société des nations (SDN), l'Organisation des Nations unies a fondé sa charte sur l’hégémonie par les pays vainqueurs à l’issue de la Seconde Guerre mondiale (1939-1945) pour prendre le contrôle de la décision au sein de l'Organisation internationale.
Près de quatre-vingts ans après la fin de la Seconde Guerre mondiale, les mêmes fondements de l'hégémonie sont toujours aux mains de cinq Etats, en l'occurrence, les États-Unis d'Amérique, la Fédération de Russie, le Royaume-Uni, la Chine et la France, bien que les pays défaits lors de la Guerre, tels que l'Allemagne et le Japon contribuent actuellement à près de 28% du budget de l’ONU, avec 30 milliards de dollars, se plaçant ainsi directement après les États-Unis.
Toutefois, l'injustice touche particulièrement les pays arabes, musulmans et africains ainsi que ceux de l'Amérique latine qui ne détiennent aucun siège permanent au sein du Conseil de sécurité.
La région arabe dispose actuellement d'un siège non-permanent qui est assuré par alternance par l’un des Etats de la zone à titre informel, d'autant plus que la position de l’Afrique du Nord et de la région du Moyen-Orient les place au cœur du « Vieux monde ».
De même, si l'on considère la population des pays arabes qui a dépassé les 430 millions d'habitants, selon des statistiques de 2020, cette région se classe troisième mondiale après la Chine et l'Inde.
Par ailleurs, la superficie du monde arabe dépasse les 13,5 millions de kilomètres carrés, ce qui le classe deuxième après la Russie. De plus, les pays de cette région contrôlent plusieurs détroit et passage vitaux et névralgique pour le commerce international.
Économiquement, l’Arabie Saoudite fait partie du G20 en plus du fait que c’est le premier exportateur mondial de pétrole et les habitants du Qatar disposent, à la faveur des exportations en gaz de l’émirat du Golfe, du revenu par habitant le plus élevé au monde.
Sur un autre plan, les pays arabes recèlent des réserves gigantesques en pétrole et en gaz, ce qui leur confère une importance extrêmement stratégique en termes de sécurité énergétique mondiale.
Siège permanent pour les Arabes
Le 12 novembre 2014, le délégué du Koweït aux Nations unies, al-Outeibi, a demandé, au nom du groupe arabe, une représentation arabe permanente au sein du Conseil de sécurité, et ce au cours d'une séance de l'Assemblée générale de l’ONU consacrée à l'examen d'une représentativité juste au sein du Conseil.
Le délégué du Koweït avait déclaré à l'époque que « la position des pays membres de la Ligue des Etats arabes (LEA) concernant le processus de réforme du Conseil de sécurité est connu pour tous ».
Il s'agit, a-t-il dit, d'une « réclamation d'une représentation permanente en prévision de tout éventuel élargissement futur dans la catégorie des sièges permanents du Conseil de sécurité ».
« Il n'est pas acceptable, d’un point de vue arabe, que cinq Etats qui siègent en permanence jouissent du droit de veto et contrôlent le sort du monde, en particulier lorsqu'il s'agit de questions, de causes et de crises arabes multiples qui ont émergé au cours des huit dernières décennies », a-t-il renchéri.
Un veto injuste
Les Arabes ont été parmi les peuples qui ont subi le plus le diktat du veto et qui ont été victimes de cet outil utilisé par les États-Unis, à titre d'exemple, à 43 reprises en faveur d'Israël, entre 1976 et 2017, ce qui a assuré une protection à Tel-Aviv contre toute condamnation internationale des violations et des pratiques commises par cet Etat à l'encontre des Palestiniens.
Le véto américain a encouragé Israël à pérenniser ses exactions et à étendre la colonisation, en plus des assassinats et des arrestations arbitraires, de l'annexion de territoires arabes en 1967, de l'incendie de la mosquée à al-Aqsa en 1969 et de l'invasion avant l’occupation du sud du Liban en 1982.
Les États-Unis ont également eu, très souvent, un appui auprès de leurs deux alliés, à savoir le Royaume-Uni et la France dans les résolutions soutenant Israël, dans la mesure où Paris et Londres disposent aussi du droit de veto. Il convient de noter, cependant, que le recours de Washington à ce mécanisme a été plus abusif.
En contrepartie, la Russie a utilisé le veto à maintes reprises au sein du Conseil de sécurité pour empêcher la condamnation des pratiques et autres exactions perpétrées par le Régime de Damas contre le peuple syrien et pour entraver l'envoi de commissions d'enquête, ou encore pour éviter que des sanctions soient infligées à l'encontre du régime d’al-Assad pour usage d'armes chimiques contre des populations civiles désarmées.
Entre 2011 et 2018, la Russie a recouru au véto pour soutenir Damas à douze reprises.
De même, aucun mécanisme de reddition de comptes n’est établi à l'encontre des Etats membres permanents du Conseil, et qui furent les auteurs de crimes, de violations et d’exactions, tels que ceux commis par les États-Unis en Irak, par la Russie dans la ville syrienne d’Alep ou encore les essais nucléaires français en Algérie.
A cause du veto américain, l'Etat de la Palestine ne peut être un Etat aux pleines prérogatives exerçant son droit de vote, et ce en dépit du soutien qui lui a été apporté par 138 pays, au cours d’une séance de l’Assemblée générale, contre neuf votes hostiles et 41 abstentions.
Ainsi, il suffit d'un simple veto américain pour rendre sans objet et annuler la volonté de 138 pays, ce qui reflète l'ampleur de l'injustice subie par les Arabes, dans la mesure où les résolutions de l'Assemblée générale de l’ONU ne sont point contraignantes.
Cette situation a été vilipendée par les Arabes et ces critiques ont été exprimées par le délégué du Koweït qui a lancé que « l'abus dans l'usage par les cinq pays permanents du Conseil de sécurité de ce droit de veto dans plusieurs situations contribue à entamer la crédibilité du processus de prise de décision au sein du Conseil de sécurité et représente toujours un moyen efficace pour protéger certains gouvernements de toute reddition de comptes et de toute imputabilité ».
Les options des Arabes
Depuis le lancement par le défunt président algérien, Haouari Boumediene (1965-1978) de son célèbre appel en 1974 qui évoquait l'impératif de mettre en place un nouvel Ordre économique mondial, les pays arabes s'activent, sur plusieurs fronts pour réformer le dispositif onusien.
Les pays arabes agissent en un seul bloc au sein des Nations unies pour réclamer un siège permanent au sein du Conseil de sécurité et pour conférer un caractère contraignant aux résolutions votées par l'Assemblée générale, d'autant plus que les cinq Etats membres permanents au sein du Conseil de sécurité ne disposent pas du droit de veto portant sur les résolutions de l’AG.
Les pays arabes réclament également de ne pas circonscrire la rédaction des résolutions, des déclarations et des rapports, à un cercle restreint, dans la mesure où « ce sont trois membres permanents du Conseil de sécurité qui sont responsables exclusivement du mandat de la rédaction de textes relatifs à la situation de pays inscrites à l’ordre du jour du Conseil de sécurité », selon un responsable onusien.
L'Arabie Saoudite et le Koweït ont défendu, au nom du Groupe arabe au Conseil de sécurité, en 2018, une représentativité permanente avec des prérogatives entières dans la catégorie des sièges permanent ainsi que pour une représentativité arabe appropriée dans la catégorie des sièges non permanents.
L’Egypte se mobilise également dans le cadre d'une alliance quadripartite, composée également de l'Italie du Pakistan et du Mexique pour réclamer un siège permanent de ses États, dans une concurrence avec un groupe parallèle appelé 4G, qui compte en son sein l'Allemagne, le Japon, l'Inde et le Brésil.
L'Algérie s’active, de son côté, en coordination avec plusieurs pays africains de premier plan à l'instar de l'Afrique du Sud et du Nigeria, pour que le continent dispose d'un siège permanent du Conseil de sécurité qui pourrait échoir à un pays arabe du nord du continent.
Le Mouvement des non-alignés constitue également un autre espace au sein duquel plusieurs pays arabes, notamment l'Algérie et l'Égypte, mènent des actions à ce niveau pour nouer des alliances avec des pays du continent asiatique et de l'Amérique latine afin de mobiliser un soutien international, avec comme objectif celui de réformer le système des Nations unies.
Certes, les cinq Etats permanents du Conseil de sécurité ne vont pas céder facilement et ne lâcheront pas leurs prérogatives au sein du Conseil qui leur accorde de facto le statut de puissance et cela implique des pays arabes de faire preuve de davantage de cohérence et de s'allier avec d'autres espaces (islamique, africain, asiatique ou latino-américain), afin de parvenir à mener à terme les réformes onusiennes justes, dans la mesure où « le monde est supérieur à 5 », comme cela a été martelé à maintes reprise par le Président turc Recep Tayyip Erdoğan.
Source : AA