Dans une interview accordée au journal français « Le Monde« , le président de la Commission consultative nationale pour une nouvelle République, Sadok Belaïd, est revenu sur le projet de constitution tel qu’il a été publié le 30 juin 2022 au JORT, et qu’il a jugé « dangereux ».
Entre autre point soulevé, M. Belaïd estime que « le pouvoir est en train de s’orienter, à travers le soi-disant principe du présidentialisme, vers l’établissement d’une sorte de dictature sans fin dans le pays au profit du président actuel ».
S’agissant de la référence « la Tunisie fait partie de la Umma islamique » dans l’un des articles (Article 5), le professeur Belaïd a mis en garde contre « le risque de son utilisation orientée vers un conservatisme rigoureux, vers un retour aux âges obscurs de la civilisation islamique ».
« Le risque est aussi dans une « reconstitution » du pouvoir et des extrémismes religieux qui en ont découlé. Il y a une très grande différence à ce propos entre les deux textes. La culture qui prédomine en Tunisie, c’est une culture de modération, d’ouverture et de tolérance et non pas de la mise en place d’un pouvoir religieux qui n’a été que rétrograde et anti-démocratique », a-t-il dit.
Pour lui, « idéologiquement, il s’agit d’un modèle rétrograde et dépassé » et « demande simplement au chef de l’Etat d’annuler son projet, qui a une valeur déplorable ».
Sadok Belaïd estime que le président de la République doit « relancer le débat auprès de l’opinion publique sur l’ensemble de la construction du pouvoir dans notre pays », à travers un dialogue plus large, notant que le mode d’élection de l’Assemblée est flou et ne précisant pas si cette Chambre sera élue au suffrage direct ou non.
Son projet était favorable à un bicaméralisme, chose non-retenue par le projet présidentiel. « Son projet renvoie à la théorie plus ou moins fumeuse de la « construction de la démocratie par la base » qui nous promet une sacrée pagaille », a ajouté M. Belaïd.
Et d’ajouter que l’absence de bicaméralisme « va nous amener à une belle anarchie dans le pays. Il y aura une assemblée qui agira et réfléchira politiquement et une autre qui réfléchira en termes de concurrence économique entre les différentes régions. Si on ne tranche pas, il y aura, un jour ou l’autre, une région qui va prédominer sur le reste du pays. Et actuellement, c’est parfaitement plausible et prévisible ».
Source : Webdo