Burkina Faso / Coup d'Etat : réactions mitigées de la classe politique et de la société civile

La classe politique et la société civile burkinabè ont diversement commenté la prise du pouvoir, lundi, par des militaires réunis au sein du Mouvement patriotique pour la sauvegarde et la restauration (MPSR), a-t-on constaté sur place.

"L’action des militaires a permis au Burkina Faso d’éviter un champ de ruine de la part du président Roch Kaboré", a déclaré lors d’un point de presse le porte-parole d’un collectif d’Organisations de la société civile (OSC) Valentin Yambkoudougou.

Yambkoudougou, par ailleurs responsable du "Mouvement sauvons le Burkina Faso" qui a organisé plusieurs manifestations hostiles au régime de Roch Marc Christian Kaboré, a ajouté que l’avènement des militaires "donne raison à nos souffrances et nous permet de féliciter ces jeunes et dignes officiers d’un pays qui était en voie de disparition".

"Nous devons redoubler plus que jamais d’efforts pour soutenir le MPSR qui est venu comme un messie pour sauver le Burkina Faso", a-t-il indiqué.

Un peu plus tôt en début de journée du mardi, une manifestation en soutien à la junte militaire, au pouvoir, s'est déroulée à Ouagadougou, la capitale burkinabè.

Plusieurs organisations de la communauté internationale notamment la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao) ont condamné cette prise du pouvoir par la force.

Dans la foulée, la Cédéao a annoncé un sommet extraordinaire dans les prochains jours sur la situation qui prévaut au Burkina Faso.

Dans la même lancée, cinq formations politiques burkinabè à savoir, l’APR-TILIGRE, le Mouvement SENS, le PAREN, le PDS et le PUR – parmi lesquels des partis de la mouvance présidentielle et de l’opposition - ont condamné ce coup d’Etat.

Nous "appelons nos militants, sympathisants, les démocrates et tous les patriotes de notre pays à rester mobilisés pour la préservation et la pérennisation de nos acquis démocratiques et des idéaux de l’insurrection populaire des 30 et 31 octobre 2014", ont-ils écrit mardi, dans une déclaration conjointe.

Ils se disent "engagés et déterminés à tout mettre en œuvre pour éviter un régime arbitraire dans notre pays", tout en appelant "à la restauration rapide de l’ordre constitutionnel".

Dans une déclaration, le Front patriotique pour le renouveau (FPR ex opposition) a expliqué que l’ancien président Roch Marc Christian Kaboré n’était plus en mesure d’assurer l’unité et la cohésion du peuple Burkinabè au sein d’une situation nationale profondément dégradée.

C’est pourquoi, "les Forces Armées ont pris leur responsabilité en procédant à son arrestation", a indiqué le président du FPR Aristide Ouédraogo expliquant qu’"il y a des moments dans la vie où il faut savoir rester, quoi qu’il en coûte, en phase avec les aspirations populaires dans une constance assumée".

Pour le Parti pour le Développement et le Changement (PDC) de Saran Séré Sérémé, ex-médiateur du Faso qui avait quitté la mouvance présidentielle en septembre 2021, "l’armée s’est vue dans l’obligation de répondre aux cris du cœur du peuple meurtri".

- Les mêmes causes produisent les mêmes effets

"Je ne cesserai de répéter qu’une intervention armée dans un processus démocratique est généralement une conséquence d’une gouvernance par embuscade (corruption, crimes, mensonge d’Etat, arrogance, suffisance, violation des libertés, non tenue des engagements etc.). On pourrait donc condamner vivement une conséquence, mais tant que la cause n’est pas fortement combattue et éradiquée, les conséquences se présenteront toujours", a commenté dans une tribune, Bassolma Bazié, ancien secrétaire général de la Confédération générale du travail du Burkina Faso.

Bazié a appelé les militaires qui viennent d’intervenir une fois de plus sur la scène politique au Burkina Faso, de réserver un traitement humain aux personnalités mises aux arrêts et de travailler sur un bref délai et de façon urgente à la réouverture des frontières.

"En effet, la situation nationale est tellement particulière que nous ne pouvons pas nous réserver ce « luxe » ; comprendre que la seule sécurité pour tout pouvoir, c’est sa légitimité populaire, c’est-à-dire, poser des actes en conformité avec les aspirations du peuple au nom duquel on agit. Dans les mêmes conditions de pression et de température, on a invariablement le même résultat. Autrement dit, les mêmes causes produisent les mêmes effets !", a-t-il écrit.

Pour rappel, dimanche matin, des militaires burkinabè ont mené un coup d’Etat qui a abouti à l’arrestation du Président Roch Marc Christian Kaboré.

Ils ont, ensuite, mis en place le Mouvement patriotique pour la sauvegarde et la restauration (MPSR) avec en tête le lieutenant-colonel Paul-Henri Sandaogo Damiba.

Le gouvernement ainsi que des institutions de l’Etat ont été dissouts.

Dans un document manuscrit publié par la télévision publique (RTB), le Président du Burkina Faso Roch Marc Christian Kaboré avait déclaré avoir démissionné "dans l’intérêt supérieur de la nation".

Mais pour la Cédéao la démission du Président Roch Marc Christian Kaboré a été obtenue "sous la menace, l’intimidation et la pression des militaires après deux jours de mutinerie".

Le Haut-commissariat aux droits de l’Homme de l’ONU a également réclamé mardi, la "libération immédiate" de Kaboré, déposé par un coup d’État militaire.

"Nous demandons aux militaires de libérer immédiatement le président Roch Marc Christian Kaboré et les autres hauts responsables qui sont détenus. Nous demandons incessamment un retour rapide à l’ordre constitutionnel", a-t-il écrit.

Source : AA

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