Le président de l’Association des exportateurs algériens (Anexal), Ali Bey Nasri, évalue entre 4 et 4,5 milliards de dollars le montant des exportations algériennes en 2021. Il réclament la réouverture du poste frontalier de Debdeb avec la Libye pour exporter les produits algériens vers ce pays.
Le président de l’Anexal dénonce par ailleurs la persistance des obstacles qui freinent encore l’acte d’exportation et pointe la Banque d’Algérie. Entretien.
Quel est l’impact de la réouverture du poste de Bouchebka avec la Tunisie sur les exportations algériennes ?
Ce qui nous intéresse, c’est le marché libyen. On ne vend pas en Tunisie autant qu’en Libye. Maintenant qu’il y a une amélioration en Libye, il faut qu’on puisse partir vers ce pays.
On a parlé de l’ouverture de Debdeb (frontière entre l’Algérie et la Libye). C’est cela qui nous intéresse car on a beaucoup de flux vers la Libye. Les besoins des Libyens pour nos produits sont plus importants.
Les usines qui fonctionnaient en Libye ont pratiquement été détruites (à cause de la crise politique et sécuritaire).
L’ouverture du poste frontalier de Bouchebka (frontière avec la Tunisie) n’est pas aussi importante pour nous que l’ouverture de celui de Debdeb. Les Tunisiens disposent de sociétés internationales qui achètent chez nous mais qui vendent en Libye.
On attend toujours l’ouverture du poste frontalier de Debdeb ce qui nous permettra d’accéder directement en Libye sans passer par la Tunisie.
En termes de volume d’exportations, que représente le marché libyen pour les opérateurs algériens ?
Le marché libyen peut atteindre entre 200 et 300 millions de dollars dans l’immédiat. Parce que comme je l’ai déjà mentionné, il y a dans ce marché une très forte demande tant sur les matériaux de construction que sur les produits industriels.
Des pays sont déjà présents et ont signé des contrats importants en matière de reconstruction des infrastructures libyennes. La Libye s’achemine vers la reconstruction et c’est un marché potentiel pour nous.
Les Égyptiens y ont déjà signé des contrats. En ce qui nous concerne, je ne dis pas que nous sommes en retard mais il y a une urgence. Aussi, la Libye peut être une destination pour nos produits pharmaceutiques, de BTPH et de biens de consommation.
La Libye est un marché important pour nous. À titre d’exemple, avant la crise libyenne, la Tunisie exportait vers ce pays pour 2 milliards de dollars de marchandises dont des produits algériens.
Il y a donc urgence à ouvrir le poste frontalier de Debdeb où les Libyens sont prêts à venir pour acheter des produits algériens, surtout que nous avons un bon rapport qualité/prix sur ce marché.
L’objectif de 5 milliards d’exportations algériennes en 2021 est-il atteignable ?
Je pense que le montant des exportations algériennes en 2021 va se situer entre 4 et 4,5 milliards de dollars et ce compte tenu des projections pour les quatre prochains mois.
Ce qui justifie ce montant c’est l’augmentation des exportations de certains produits durant les huit premiers mois de l’année 2021 en comparaison avec la même période de l’année 2020.
Nous avons exporté pour 1,34 milliard de dollars durant les 8 premiers mois de 2020 et 2,9 milliards de dollars pour la même période de 2021. Soit un écart de 1,56 milliard de dollars.
Cette augmentation s’explique par la hausse des exportations des dérivés du pétrole, de l’acier, des engrais, du ciment et du sucre. Pour l’acier, les exportations ont augmenté de + 567 millions de dollars. S’agissant des engrais on en a exporté l’année dernière 886 millions de dollars, cette année l’écart est de + 362 millions de dollars.
Les exportations des dérivés des hydrocarbures ont enregistré un écart positif grâce à la remontée des prix du pétrole de l’ordre de 714 millions soit la moitié du 1,56 milliard de dollars évoqué plus haut.
Pour le ciment, on a enregistré une augmentation de 155 millions de dollars et +90 millions de dollars pour le sucre. On peut à la lumière de ces chiffres dire que la diversification de nos exportations est à venir.
Le constat que l’on peut faire c’est que le développement des exportations est intimement lié à l’investissement. Et c’est ce qui a permis d’atteindre ce chiffre.
Pour autant, les réformes que vous avez réclamées ont-elles abouti ?
Pour ce qui nous concerne, nous avons finalisé et transmis aux autorités du pays la stratégie nationale des exportations. Cette synthèse regroupe toutes les contraintes qui concernent les exportations : ça va des plateformes d’exportation à la logistique.
Si le transport terrestre ne pose pas trop de problème, en matière de transport maritime nous dépendons entièrement des opérateurs étrangers.
La stratégie qu’on a élaborée a pointé ce problème : il est impératif de « réarmer » le pavillon national. Rien n’empêche d’affréter des navires par des entreprises privées, par la CNAN pourquoi pas. Nous avons essayé d’identifier tous les goulots d’étranglement, il faut des mesures pour les solutionner.
La Banque d’Algérie a-t-elle changé sa vision par rapport aux exportateurs ?
Nous avons fait des propositions très sensées mais la Banque d’Algérie n’a pas encore compris que l’internationalisation des entreprises est un impératif.
On ne peut pas rester à l’écart de ce qui se fait par ailleurs. Tous les pays aident leurs exportateurs pour investir les marchés internationaux, parce qu’investir à l’étranger est un levier de croissance pour l’entreprise et pour le pays.
Finalement, les problèmes des exportateurs demeurent les mêmes…
Pour nous, la situation s’est aggravée. On doit nous laisser plus que jamais ouvrir des bureaux de liaison et des showrooms à l’étranger et ainsi développer des réseaux à partir du compte exportateur ce qui ne touche en aucun cas les réserves de change du pays.
Source : TSA