C’est cette semaine que la justice russe doit étudier une demande d’inscrire le Fonds de lutte contre la corruption, créé en 2011 par Alexeï Navalny, sur la liste des organisations « terroristes et extrémistes ». Une offensive de plus contre la bête noire du Kremlin.
Le Kremlin multiplie les offensives contre Alexeï Navalny et ses alliés, attaqués sur tous les fronts. Outre plusieurs condamnations visant l’opposant et ses proches, une procédure a été lancée pour mettre hors jeu le Fonds de lutte contre la corruption (FBK), créé en 2011 par l’avocat âgé aujourd’hui de 44 ans.
Une mesure radicale
À la demande du bureau du procureur de Moscou, la justice russe doit examiner, à partir de ce lundi 26 avril, une demande d’inscription du FBK et des bureaux régionaux de l’opposant sur la liste des organisations « terroristes et extrémistes » du Comité national antiterroriste. Cette liste compte pour l’heure 33 noms, dont ceux des talibans, de Daech ou encore des Témoins de Jéhovah.
Le parquet moscovite a motivé sa requête visant les groupes liés à la bête noire du Kremlin en estimant qu’ils « s’emploient à créer les conditions de la déstabilisation de la situation sociale et sociopolitique » en Russie. « Les objectifs réels de leurs activités, poursuit-il, sont de créer les conditions pour changer les fondements de l’ordre constitutionnel, y compris en utilisant le scénario de la «révolution de couleur» ».
Le FBK est connu pour de nombreuses enquêtes dénonçant les malversations des élites russes. Sa production ayant connu le plus large écho est une vidéo diffusée sur YouTube en janvier dernier accusant Vladimir Poutine de s’être fait construire un « palais » sur les bords de la mer Noire. Elle affiche plus de 115 millions de vues.
De lourdes conséquences potentielles
En cas de réponse favorable à la demande du parquet de Moscou, le FBK serait interdit et de lourdes sanctions frapperaient les collaborateurs d’Alexeï Navalny, lui-même condamné, en mars, à deux ans et demi de prison pour une affaire de fraude remontant à 2014.
Rejoindre cette liste ouvre en effet la voie à des condamnations importantes. À l’image de celles frappant, depuis 2017, les Témoins de Jéhovah, déclarés extrémistes par la Cour suprême russe et interdits depuis. Plusieurs membres de cette communauté religieuse ont été punis de peines allant jusqu’à six ans de prison ferme, et les perquisitions les visant se sont multipliées à travers tout le pays.
Alexeï Navalny et Ivan Jdanov, directeur du FBK, avaient réagi par communiqué à la requête du parquet de Moscou, estimant n’avoir aucun doute quant à la décision du « tribunal de Poutine ». Ils avaient assuré qu’ils « continueront (leur) travail pacifiquement, publiquement, efficacement ».
Le FBK a déjà eu ses avoirs gelés en 2019, et reçu de multiples amendes, notamment pour n’avoir pas correctement déclaré être « agent de l’étranger », désignation vague visant toute organisation bénéficiant de financement étranger et exerçant une « activité politique ».
Fin de la grève de la faim d’Alexeï Navalny
Vendredi 23 avril, l’opposant a interrompu, à la demande des médecins, une grève de la faim entamée trois semaines plus tôt pour dénoncer ses conditions de détention ainsi que le refus de soins médicaux pour traiter une hernie discale. Selon ses proches collaborateurs, Alexeï Navalny a finalement été ausculté dans un hôpital civil et son dossier médical transmis à ses docteurs.
« Les médecins en qui je crois pleinement ont annoncé hier (jeudi, NDLR) que nous avions atteint suffisamment de choses pour que je mette fin à ma grève de la faim », a écrit Alexeï Navalny en annonçant mettre fin à sa grève.
Alexeï Navalny avait été arrêté sitôt rentré d’Allemagne en janvier, après cinq mois de convalescence pour se remettre de son empoisonnement à l’agent innervant Novitchok.
Source : La Croix