Algérie: Djerad face à son bilan

Certes, la situation économique et financière difficile du pays, à laquelle s’est greffée la crise sanitaire intensifiant la complexité de l’équation Algérie, plaident en faveur de l’exécutif, mais ne justifient, cependant pas, tous les ratés observés après 12 mois d’exercice.

         Le retour au pays du président Tebboune, après des soins en Allemagne, est de nature à remettre tout le monde au boulot. Il est de nature à redonner du mouvement dans le statu quo du gouvernement, «plombé» par des dissonances, des couacs, des chevauchées solitaires de certains de ses membres ou encore par des «ratés» d'autres membres. Mais cette «réanimation» de l'Exécutif n'implique nullement une reprise normale de ses activités. Car, le pronostic vital du gouvernement s'est retrouvé sérieusement engagé depuis le désaveu du chef de l'Etat qui a reproché, publiquement, au gouvernement, son bilan mitigé. Il est donc essentiel de poser le diagnostic et de faire un bilan d'étape. Cette nécessité s'impose d'autant que la Loi fondamentale, dernièrement adoptée, stipule que «le Premier ministre ou le chef du gouvernement, selon le cas, doit présenter annuellement à l'Assemblée populaire nationale, une déclaration de politique générale» laquelle «donne lieu à débat sur l'action du gouvernement». La déclaration de politique générale que devrait présenter Abdelaziz Djerad devant l'APN, si le remaniement ébruité n'intervient pas avant, ne se fera pas sans un flash-back sur l'année d'exercice qu'il a passée aux commandes de l'Exécutif. Quel sera son bilan? Sera-t-il à la hauteur des attentes du chef de l'Etat qui lui a confié de mettre en oeuvre son programme? Il faut dire que diriger le premier gouvernement post-Bouteflika, n'a pas été une tâche facile.

          Nommé Premier ministre dans un climat politique compliqué, Abdelaziz Djerad n'était pas sans savoir que sa marge de manoeuvre était très limitée tant la situation économique et financière du pays était difficile. Lui et son équipe ont à peine eu le temps de défaire leurs cartons qu'ils devaient déjà faire face à la crise sanitaire de la Covid-19. Une crise qui a fait chuter les prix des hydrocarbures, principale sinon unique ressource en devises du pays, dans le sillage de l'arrêt de l'économie mondiale. C'est dire que la complexité de l'équation Algérie s'est retrouvée intensifiée. Mais même si ces imprévus plaident en faveur de l'Exécutif, ils ne justifient, cependant pas, tous les manquements observés après 12 mois de gestion. Certes, les décisions courageuses prises au début de la pandémie de coronavirus ont permis à l'Algérie d'éviter le chaos redouté et la vaccination a bien été lancée, malgré les manquements et les tergiversations. Cependant, le gouvernement n'a pas su faire face aux retombées socio-économiques de cette crise. Le chômage a fortement augmenté, le pouvoir d'achat est en chute libre et le citoyen, démuni dans cette Algérie nouvelle qu'on lui avait présentée comme le commencement d'une vie meilleure, cache mal sa colère. La raison est simple: l'équipe de Djerad n'a pas été porteuse d'initiatives permettant le déclic salvateur pour l'Algérie. Ni les changements fondamentaux promis ni la rupture avec les anciennes pratiques n'ont été concrétisés. Les citoyens avaient besoin d'actions rapides et palpables sur le terrain pour redonner leur confiance aux gouvernants. Or, dans l'équipe Djerad, beaucoup ont échoué dans cette mission.

          Ces derniers, au lieu de proposer des solutions, énumèrent les difficultés, font dans l'opacité ou dans les promesses non tenues. Du sachet de lait qui reste introuvable jusqu'à la mise au chômage de centaines de milliers de travailleurs après la fermeture des usines, dans le cadre de la campagne anti-corruption, passant par le véhicule devenu inaccessible ou encore le prix de la sardine qui a dépassé les 1400 DA, le verdict est irréversible: le gouvernement a péché par l'absence de vision, d'ingéniosité et d'innovation, mais aussi par sa frilosité. Discret et travailleur, Abdelaziz Djerad a tenté de reprendre en main, son équipe. Il s'est activé, pris des initiatives et a même tancé ses ministres, mais son autorité ne semble pas avoir eu l'effet escompté.

           Face à cette situation et le bilan de ses soldats, que va décider le président Tebboune? Le chef de l'Etat qui tient à aller de l'avant dans ses réformes, pour l'émergence de l'Algérie nouvelle promise, et à mesure que les échéances politiques approchent, dont l'élection d'un nouveau Parlement, va sûrement trancher la question du gouvernement. Va-t-il changer des «têtes» tout en maintenant le cachet technocrate de l'Exécutif ou optera-t-il pour un gouvernement politique?

Source : lexpressiondz

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