La Force « Takuba », un pas vers l’européanisation de « Barkhane »

Quelque 150 militaires suédois ont rejoint, vendredi dernier, les rangs de la Force « Takuba » déployée au Mali, dans le cadre de la lutte contre le terrorisme au Sahel, mission prisée par la France.

En effet, les militaires suédois arrivent pour soutenir deux groupes déjà en place, un premier groupe franco-estonien à Gao et un deuxième franco-tchèque à Ménaka, au Mali, dans la région dite des "trois frontières", avec le Niger et le Burkina Faso.

Les soldats de Takuba sont déjà déployés depuis juillet dernier, en attendant l’arrivée des autres contingents issus d’armées européennes, à la suite d’un appel lancé par la France, en l’occurrence du président Emmanuel Macron qui plaide pour l’européanisation de la lutte antiterroriste au Sahel, presque à chaque prise de parole lors des sommets du G5 Sahel.

Rappelons que la Task-force européenne Takuba, annoncée lors du sommet tenu à Pau en France, le 13 janvier 2020, a été lancée sur le terrain en juillet 2020, avec pour objectif de "compléter" les actions de la Force française Barkhane en termes d'appui aux Forces armées maliennes (FAMa), en matière de lutte contre le terrorisme dans les États du Sahel.

Composée essentiellement d’une élite des forces spéciales, la Force « Takuba » (qui signifie "sabre", en langue Tamasheq) devrait atteindre sa capacité opérationnelle initiale (IOC) à compter de l’été 2020 et sa pleine capacité opérationnelle (FOC) au début de l’année 2021.

Parallèlement, la France, critiquée après avoir essuyé des pertes en vies humaines, prévoit un allègement des effectifs de la Force « Barkhane » qui compte, à ce jour, 5100 hommes.

Le président français Emmanuel Macron avait exprimé sa volonté « d’européaniser » la lutte contre le terrorisme au Sahel, lors du Sommet de Nouakchott du G5 Sahel, en juin 2020.

Macron voulait « ajuster les efforts » de ses forces et avait confirmé, ainsi, son intention de réduire la voilure de l’opération « Barkhane ».

La Force « Takuba » a été déployée à la demande du Mali et du Niger et a été placée sous le commandement de l’opération « Barkhane ».

Il est à rappeler que l’opération « Barkhane », conduite par l’armée française, en partenariat avec les pays du G5 Sahel, a été lancée le 1er août 2014. Elle repose sur une approche stratégique fondée sur une logique de partenariat avec les principaux pays de la bande sahélo-saharienne (BSS) : le Burkina Faso, le Mali, la Mauritanie, le Niger et le Tchad.

Les principales missions de « Takuba » consistent à conseiller, à assister et à accompagner au combat des unités conventionnelles maliennes, intégrées au commandement de l’opération « Barkhane », en vue de lutter contre les groupes terroristes dans la région du Liptako (région frontalière entre le Mali et le Niger), en coordination avec les partenaires du G5 Sahel, la Mission militaire intégrée des Nations Unies au Mali (MINUSMA) et les missions militaires et civiles de l’Union européenne (EUTM Mali, EUCAP Mali et EUCAP Niger).

Macron a voulu européaniser la lutte contre le terrorisme au Sahel et a plaidé pour l’implication de l’Europe dans cette zone, après l’échec de la stratégie menée par les forces françaises, qui ont essuyé des pertes à cause des attaques menées par les groupes terroristes, toujours actifs dans la région.

Cependant, face à cet appel de « détresse », l’Allemagne a refusé de répondre. Le 30 décembre 2019, Berlin a officialisé sa décision de ne pas faire partie de la Force « Takuba ». L'Espagne et le Royaume-Uni ont refusé, également, d’envoyer leurs forces au Sahel, causant un retard de démarrage de ladite mission.

En attendant une réponse favorable d’autres pays européens, la France cherche à obtenir le feu vert de ses alliés pour conférer une certaine « légitimité » à sa présence au Sahel, dès lors que les voix critiquant l’approche de Macron s’élèvent…

Au cours d’un débat parlementaire auquel ont participé la ministre des armées Florence Parly et le chef de la diplomatie Jean-Yves Le Drian, tenue mardi, les sénateurs français ont tenu à « comprendre la stratégie du gouvernement pour la période à venir concernant l’opération Barkhane au Sahel ».

Le président de la commission des Affaires étrangères, de la Défense et des forces armées au sénat, Christian Chambon, a déclaré que « savoir si 600 soldats vont ou non quitter Barkhane n'apporte pas totalement la réponse que nous attendons; nous souhaitons avant tout comprendre la stratégie du gouvernement pour la période à venir ».

Il a estimé que « compte tenu » de l’ « engagement et du prix » payé par la France, le pays est en droit d’attendre « des progrès sur la voix de la réconciliation nationale malienne ».

Ces déclarations n’ont pas plu à la ministre des Armées, Florence Parly, qui a considéré que ces prises de position ont offert « un véritable boulevard pour Daech ».

« Daech au Sahel est fortement entravé même s'il conserve encore une capacité de régénération importante (...) Il convient de noter que depuis janvier 2020, plus aucune attaque d'ampleur n'a été commise », a-t-elle martelé, pour appuyer la légitimité de la présence française dans la zone.

Selon Florence Parly, « d’autres nations sont prêtes à s’engager » auprès du G5 Sahel après avoir « compris que la stabilité du Sahel était la clef pour la sécurité européenne ».

Jusqu’au 8 février 2021, la France a perdu 55 militaires au Mali et au Sahel, lors d’attaques menées par des groupes armés toujours actifs dans ces régions. L’attaque la plus récente ayant visé les troupes françaises date de janvier dernier, lorsque cinq soldats ont été tués dans des attentats revendiqués par le GSIM (Groupe de Soutien à l’Islam et aux Musulmans).

Ces récentes attaques meurtrières ont ravivé les nombreuses critiques sur le maintien des troupes françaises au Sahel.

Source: АА

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