Algérie. Bureaucratie, logistique et réglementation des changes : Ce qui décourage les exportateurs

La politique d’appui de l’Etat algérien visant à soutenir les entreprises exportatrices bute sur d’innombrables contraintes liées au secteur bancaire et financier et à la logistique qui ne suit pas. Les embûches entravent les opérations d’exportation, impactent les coûts, la face cachée d’un processus miné par des textes d’un autre temps.

A l’instar des exportateurs des autres régions, les opérateurs de Sétif et Bordj Bou Arréridj – deux des plus importantes plateformes économiques du pays – sont confrontés à diverses tracasseries. Ayant la peau dure, la bureaucratie décourage le plus téméraire des exportateurs : «La fermeture des frontières terrestres (Tunisie et Libye) accentue nos difficultés.

Le dépôt de la marchandise dans une zone tampon génère non seulement des frais supplémentaires, mais expose nos marchandises au vol et à la détérioration. Le moindre incident de non-payement du client expose l’exportateur algérien à des poursuites judiciaires. La révision de la réglementation du flux des capitaux est indispensable. Imposées à l’entreprise exportatrice, les notes de la Banque d’Algérie, qui ne sont pas publiées au Journal officiel, nous compliquent la mission.

La position des banques ne finançant pas nos exportations est l’autre talon d’Achille de l’opération. Destiné aux entreprises réalisant un chiffre d’affaires inférieur à 10 millions de dollars, le remboursement de 50% des frais du transport est un frein aux mesures de l’Etat fixant pour l’année en cours la barrière de 5 milliards de dollars d’exportations hors hydrocarbures. Après avoir appris le métier d’importateur, nous devrions assimiler et maîtriser l’acte d’exporter car l’enjeu financier est immense», souligne Abderrahmane Benhamadi, PDG de Condor qui ambitionne d’exporter pour 100 millions de dollars en 2021.

Patron de Safcer, un groupe spécialisé dans la céramique, Amar Seklouli abonde dans le même sens : «Les mesures incitatives des pouvoirs publics tendant à promouvoir et à placer le produit algérien sur les marchés extérieurs sont freinées par d’innombrables problèmes administratifs. En plus de la lenteur des procédures d’autorisation de crédit à l’exportation, l’entreprise algérienne éprouve toutes les difficultés du monde à transférer des devises pour couvrir les frais de prospection.

L’absence du fret à l’aéroport de Sétif où les exportateurs de Bordj Bou Arréridj et de Sétif peuvent booster les exportations nationales est une contrainte non négligeable». Ahmed Haddouche, le directeur commercial d’Agro-Film – groupe spécialisé dans l’emballage du plastique – remet sur la table la lancinante question des lenteurs bureaucratiques et le volet des recettes : «Réalisant le plus grand pourcentage de notre chiffre d’affaires avec la Libye, la Mauritanie et le Mali, la fermeture des frontières terrestres nous pénalise. Nous devrions créer des mécanismes pour pérenniser le transfert de nos produits vers l’étranger, que ce soit par voie maritime, aérienne ou terrestre.

Le remboursement des frais de transport est bloqué. Les dossiers sont déposés mais point de remboursement. La rétrocession des recettes d’exportation à hauteur de 50% bloque les exportateurs disposés à réinvestir l’autre moitié des recettes ne stimule pas l’exportateur confronté à une montagne de problèmes», dira notre interlocuteur.

Expert financier, Ali Mansouri, le président de la Chambre de commerce et d’industrie (CCI) de Sétif, met le doigt sur le nerf de la guerre : «Les textes régissant le financement des opérations d’exportation sont dépassés. L’interdiction faite aux entreprises algériennes d’établir des représentations à l’étranger est une contrainte.

La réglementation des changes demeure le principal frein à l’exportation. Datant de février 2007, le règlement de la Banque d’Algérie n’est plus adapté au contexte actuel et à la nouvelle approche des pouvoirs publics», précise-t-il.

Source : El Watan

 

 

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