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- Le 22 Novembre 2024
Chef de l’État participe virtuellement, lundi et mardi, à un sommet du G5 Sahel à N’Djamena.
La menace est présentée comme réelle mais le sommet sera virtuel. Emmanuel Macron ne se déplacera pas lundi et mardi à N’Djamena, au Tchad, pour un sommet avec ses homologues du Sahel consacré à l’avenir de l’opération Barkhane. Un peu plus d’un an après avoir décrété un sursaut et avoir envoyé 600 soldats supplémentaires sur le terrain, portant les effectifs des armées à 5 100 militaires, l’heure était pourtant venue de tirer un bilan. Il fallait «ajuster», selon le mot du président, le format de l’opération qui lutte depuis 2013 contre les groupes terroristes djihadistes au Sahel. Mais le chef de l’État a décidé de s’appliquer à lui-même les restrictions de déplacements liés à l’épidémie du coronavirus, dit-on à l’Élysée. Et «les conditions sanitaires ne sont pas très bonnes sur place», ajoute-t-on au ministère des Armées. Alors le sommet se déroulera en distanciel.
En disloquant en briques virtuelles l’événement, le chef de l’État court le risque d’en limiter la portée symbolique. Les décisions attendues semblent aussi avoir été reportées, comme le retrait d’une partie des effectifs pour revenir à la situation précédant le «surge». Celui-ci passait pour acquis durant les semaines précédentes. «Il y a une réflexion en cours sur le réajustement (du dispositif) mais ce n’est pas une réflexion solitaire», explique-t-on maintenant dans l’entourage du chef de l’État en précisant qu’elle s’étalera «sur les prochains mois». En amont du sommet, le président a rencontré ses cinq homologues de Mauritanie, du Tchad, du Burkina Faso, du Niger et le président de transition du Mali, nommé après le coup d’État de l’été dernier. Avec eux, il a constaté les effets militaires obtenus depuis un an mais la faiblesse des progrès politiques.
«Le pilier militaire a progressé plus vite que les autres», dit-on à l’Élysée en regrettant que les succès tactiques, qui ont permis d’affaiblir l’État islamique au Grand Sahara dans la région des trois frontières ne se soient pas accompagnés d’un retour de l’autorité des États dans ces régions. Paris réclame donc «un sursaut» de ses partenaires. L’action politique «est le chaînon manquant entre le militaire et le développement», soupire-t-on. À N’Djamena sera nommé un haut-représentant de la Coalition pour le Sahel: Djimé Adoum.
Militairement, le bilan est aussi en demi-teinte, même si à l’Élysée on assure que le «surge» de 2020 a permis «de sauver une deuxième fois le Sahel» et qu’il s’agit désormais «d’amplifier» la dynamique. Les groupes terroristes ont déjà pris de sérieux coups: le président de la commission de la défense au Sénat, Christian Cambon, évoquait un bilan - tenu secret par les armées de 1 200 à 1 500 djihadistes éliminés depuis un an. «Le “surge” a permis à Barkhane de gagner en liberté d’action et de créer plus d’incertitude et d’imprévisibilité pour nos adversaires. Il a donné une capacité à durer sur le terrain», notait la semaine dernière le général Conruyt, le commandant de la force Barkhane, lors d’une rencontre avec la presse, en estimant avoir atteint les objectifs qui lui avaient été fixés. Avec moins d’hommes, il mènera mécaniquement moins d’opérations.
Or la menace n’a pas disparu: certes l’EIGS, la filiale de Daech au Sahel, a perdu sa capacité à mener des opérations d’ampleur, mais le Rassemblement pour la victoire de l’islam et des musulmans, lié à al-Qaida, a multiplié les attaques ces dernières semaines. La situation sécuritaire ne s’est pas améliorée au Sahel, selon le dernier rapport de l’ONU, malgré les succès de Barkhane. Si l’état-major vante les progrès des armées sahéliennes, celles-ci ne paraissent pas encore en mesure d’assurer seules leur défense sans réassurance française.
Le RVIM «poursuit son projet politique», note le général Conruyt en observant «l’agressivité» de ce groupe et la capacité de son chef Iyad Ag Ghali à construire une «coalition structurée» derrière lui. Le RVIM menace d’étendre son influence vers les États du golfe de Guinée: Togo, Bénin, Ghana, Côte d’Ivoire, dit-on aussi au ministère des Armées. Contre cet ennemi, Barkhane ne suivra pas la même stratégie symétrique qu’envers l’EIGS: plutôt qu’occuper le terrain pour empêcher l’adversaire de créer des sanctuaires, elle ciblera «la haute hiérarchie» du mouvement.
Pour donner une perspective au Sahel, la France a besoin de leviers autres que militaires. À N’Djamena, les chefs d’État discuteront aussi des moyens alloués au développement: sans perspectives, les populations locales n’ont souvent pas d’autre choix que se tourner vers les groupes armés. «Ce n’est pas un problème de financement», dit-on au ministère des Armées. «L’argent est là, toute la difficulté est de déployer des projets concrets», ajoute-t-on en insistant sur la nécessité de «synchroniser» l’action militaire et celle de développement. Au Sahel, la guerre se mène sur des terrains, des ennemis et des tempos différents.
Source : lefigaro