Donbass : cinq minutes pour comprendre le regain de tension entre l’Ukraine et la Russie

Les combats ont pris de l’ampleur cette semaine dans la région du Donbass, à l’est de l’Ukraine. La communauté internationale appelle à l’apaisement.

Aux dires du ministre des Affaires étrangères ukrainien, Dmytro Kuleba, il s’agit de la situation la plus grave depuis que des bateaux militaires russes ont attaqué des vaisseaux ukrainiens en mer d’Azov, à la fin de l’année 2018. Samedi, un soldat ukrainien a perdu la vie sur la ligne de front. Une situation qui devient de plus en plus fréquente à la frontière entre l’Ukraine et la Russie, dans la région du Donbass. Dix soldats ont été tués depuis le début du mois de mars, alors que le nombre de décès recensés depuis le début de l’année côté ukrainien s’élève à 21. Selon l’OSCE, les violations du cessez-le-feu ont augmenté de 30 % entre les mois de février et de mars. La majorité des soldats ukrainiens décédés auraient été abattus par des tirs de sniper. On fait le point sur la situation.

Que s’est-il passé ces derniers jours ?

L’Ukraine accuse la Russie d’accumuler des milliers de militaires aux frontières nord et est, ainsi qu’en Crimée, péninsule annexée par Moscou en 2014. Selon Kiev, Moscou peut désormais compter sur la présence de 28 000 combattants séparatistes et plus de 2000 conseillers militaires et instructeurs russes dans les territoires sous contrôle rebelle dans l’est de l’Ukraine, ainsi que sur 33 000 militaires en Crimée.

Le renseignement militaire ukrainien a donc accusé les Russes de préparer « l’entrée » de ses « forces armées régulières » dans les territoires séparatistes « au motif d’y protéger » ses citoyens, la Russie ayant distribué des centaines de milliers de ses passeports dans ces régions. Le Kremlin n’a pas formellement démenti les mouvements de troupes, relevant que la Russie « déplace ses forces armées sur son territoire comme elle l’entend ». Il a nié de nouveau toute présence russe dans le Donbass.

Ces tensions interviennent après une trêve d’une durée record durant la deuxième moitié de 2020 en Ukraine. Mais depuis janvier, les heurts se sont multipliés entre séparatistes et forces ukrainiennes, chaque camp s’en rejetant la responsabilité. En cause, la paralysie des pourparlers de paix réunissant l’Ukraine et la Russie sous médiation franco-allemande.

Si les accords de paix de Minsk de 2015 issus de ces négociations à quatre ont considérablement réduit la violence, sur le fond aucun progrès n’a eu lieu. Le dernier sommet en décembre 2019 à Paris n’a pas été suivi d’avancées politiques concrètes. Aucune nouvelle rencontre n’est prévue.

Pourquoi Moscou maintient une telle pression ?

Vladimir Poutine perçoit sans nul doute de nombreux intérêts à agir ainsi, qui dépassent d’ailleurs la seule question des rapports entre l’Ukraine et la Russie. Le président russe sait parfaitement qu’il oblige ainsi les Occidentaux à se positionner sur le dossier. Au premier rang desquels son homologue américain Joe Biden.

La Russie considère en effet sa relation avec l’Occident comme étant à son plus bas, et semble déterminée à montrer ses muscles face au nouveau président américain, qui a qualifié son homologue russe Vladimir Poutine de « tueur » et a juré de lui faire « payer » l’ingérence dans les élections américaines. « Les Russes montrent qu’ils n’ont peur de personne », relève Oleksandr Lytvynenko, directeur de l’Institut national des études stratégiques. Autre avantage : Moscou remet au passage « l’Ukraine à sa place », poursuit-il.

Pour Kiev, insister sur la menace russe croissante est l’occasion de mobiliser ses soutiens occidentaux et notamment de voir Washington, après la présidence Trump, réaffirmer son alliance. Washington a d’ailleurs réagi en plaçant ses forces en Europe en phase de surveillance renforcée contre une « crise imminente potentielle ». Les autorités ukrainiennes, qui affirment avoir dû riposter à plusieurs reprises face aux Russes, disent espérer une réponse diplomatique. « Nous ne cherchons pas l’escalade, nous sommes fondamentalement attachés à une résolution politique et diplomatique de ce conflit, assure le ministre des Affaires étrangères. Nous ouvrons le feu uniquement s’il y a une menace pour nos militaires sur le terrain et s’ils sont attaqués ».

Que répond la communauté internationale ?

Jeudi, la Russie a averti qu’une escalade du conflit dans le Donbass pourrait « détruire » l’Ukraine. Le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, a ajouté vendredi que Moscou prendrait « toutes les mesures nécessaires » en cas d’ingérence militaire occidentale en Ukraine. A Paris, on souligne ne pas « croire à une escalade », selon le secrétaire d’Etat aux Affaires européennes, Clément Beaune. « Il y a visiblement des mouvements de troupes. On ne sait pas encore ce que cela veut dire ».

Le président Joe Biden a pris la parole sur le dossier vendredi. « Le président Biden a affirmé le soutien indéfectible des Etats-Unis à la souveraineté et à l’intégrité territoriale de l’Ukraine face à l’agression de la Russie dans le Donbass et en Crimée », au cours d’un échange téléphonique avec Volodymyr Zelensky, président ukrainien, selon le compte rendu de la Maison-Blanche. Le dirigeant ukrainien a, lui, salué le « partenariat crucial » avec Washington, à l’issue de cet échange.

Source : Le Parisien

De la même section International