Le président tunisien Kaïs Saïed a annoncé, dimanche, son intention de former une "Commission supérieure dont l'objectif est de préparer l'instauration d'une nouvelle république ", en plus d'une autre Instance chargée de conduire un dialogue qui serait "ouvert à ceux qui se sont engagés sincèrement dans la démarche de correction entamée le 25 juillet ", selon ses termes.
C'est ce qui ressort du discours adressé par Saïed aux Tunisiens à l'occasion de l'Aïd al-Fitr et qui a été diffusé par la page officielle de la présidence sur "Facebook".
"Ils (il ne les a pas nommés) exigent le dialogue, mais aujourd'hui je répète les trois non, à savoir ni réconciliation, ni négociation, ni reconnaissance pour ceux qui ont détruit le pays et y ont semé le chaos", a-t-il affirmé, ajoutant :" Ils font partie du passé et nous ne ferons pas le moindre pas en arrière".
Et de poursuivre : "Ils se lamentent au sujet de la démocratie et de la révolution, alors qu'ils tentent de la détruire par tous les moyens, et comptent parmi les ennemis acharnés de la démocratie et de la souveraineté nationale."
"Nous menons une guerre d'usure dans cette phase de l'histoire de notre patrie, et nous en sortirons victorieux. Ils ne pourront pas nous vaincre, quelles que soient leurs manigances. (...) notre action s'inscrit dans le plein respect de la légalité et de la légitimité populaire", a souligné le locataire du palais de Carthage.
Et de préciser : "Conformément au décret lié aux mesures d'exception, une commission supérieure sera formée dans le but de préparer l'établissement d'une nouvelle république qui terminera son travail dans une courte période de temps, en l'espace de quelques jours, car les thèmes et les choix sont clairs, de même que deux instances seront formées au sein de cette commission supérieure, dont une chargée du dialogue."
Il a toutefois ajouté que "le dialogue ne se fera pas avec les parties mentionnées, mais les quatre organisations nationales seront quant à elles présentes, et ce qui aura été élaboré sera ensuite présenté au peuple par référendum le 25 juillet prochain."
Les quatre organisations visées sont : l'Union générale tunisienne du travail (la plus grande organisation syndicale), l'Union tunisienne de l'industrie, du commerce et de l'artisanat (l’organisation patronale), l'Ordre des avocats et la Ligue tunisienne pour la défense des droits de l'Homme.
Le président tunisien a expliqué que "ce dialogue sera différent des dialogues précédents, et il sera ouvert à ceux qui se sont engagés sincèrement dans la démarche de correction qui a commencé le 25 juillet, mais ne sera pas ouvert à ceux qui se sont vendus, ceux qui n'ont aucun patriotisme, ceux qui ont saboté (le pays), qui ont affamé le peuple et l'ont maltraité."
Plus tôt dans la journée de dimanche, la présidence a annoncé que le prochain référendum populaire approuverait une nouvelle Constitution pour le pays.
La Constitution actuelle est celle de 2014, dite de la révolution, car elle a été adoptée suite à la révolution populaire de 2011.
Saïed n'a pas précisé ce que signifie l'établissement d'une nouvelle république, mais ses détracteurs l’accusent de vouloir instaurer un système présidentiel dans le pays, de concentrer les pouvoirs entre ses mains et d'exclure les partis de la scène politique.
Alors que Saïed a déclaré plus d'une fois qu'il visait à éliminer ce qu'il qualifie de corruption qui gangrène le système politique.
La Tunisie traverse une grave crise politique depuis le 25 juillet 2021, lorsque Saïed a imposé des mesures d’exception, notamment : la dissolution du Parlement et du Conseil supérieur de la magistrature, la promulgation de lois par voie de décrets, et la tenue d'élections législatives anticipées au 17 décembre 2022.
D’aucuns considèrent ces mesures comme un "coup d'État contre la Constitution", tandis que d'autres y voient une "correction du cours de la révolution de 2011", qui avait renversé le régime du président de l'époque, Zine El Abidine Ben Ali (1987-2011).
Saïed, qui a entamé un mandat présidentiel de 5 ans en 2019, a déclaré que ses mesures sont "des dispositions prises dans le cadre de la Constitution pour protéger l'État contre un danger imminent."
Source : AA