L’Australie refuse un visa à Ayelet Shaked
- Le 22 Novembre 2024
La situation à la frontière avec le Mexique a forcé le gouvernement à rouvrir les camps de rétention pour mineurs qu’il s’était promis de fermer. Des avocats dénoncent des conditions sanitaires déplorables.
C’était une promesse de campagne de Joe Biden : en finir avec la politique d’immigration de Donald Trump. Aussitôt entré en fonction, le nouveau président américain avait promis effacer « une honte morale et nationale » héritée de son prédécesseur républicain : la séparation de milliers de familles de migrants à la frontière sud des États-Unis, et la rétention de jeunes enfants dans des conditions sanitaires épouvantables. Des centaines d’entre eux n’ont jamais retrouvé leurs parents. Biden avait rapidement signé plusieurs décrets visant à corriger les maux causés par la politique dite de « Tolérance zéro », adoptée au printemps 2018. L’un d’eux prévoyait la mise en place d’un groupe de travail destiné à identifier et à localiser quelque 600 enfants isolés pour les rapprocher de leur famille. « La dernière administration a littéralement arraché des enfants des bras de leurs familles […] sans plan d’aucune sorte pour les réunir », avait-il alors dénoncé.
Las, les intentions se sont rapidement heurtées au mur des réalités. Depuis plusieurs semaines, la frontière sud du pays est confrontée à un nouvel afflux de migrants. Parmi eux, beaucoup de jeunes enfants non accompagnés. Sur le seul mois de février, la police aux frontières (CBP) a intercepté 100.000 clandestins à la frontière sud des États-Unis, dont 9.457 mineurs non accompagnés ainsi que 19.246 personnes arrivées en famille. Le nombre de migrants mineurs arrivés seuls à la frontière avec le Mexique était tombé en avril 2020 à un plus bas, 741, et n’a cessé de remonter depuis. En décembre, dernier mois entièrement passé sous la présidence de Donald Trump, les services douaniers avaient intercepté quelque 74.000 migrants. Le ministère de la Santé s’occupe actuellement de quelque 8.800 jeunes migrants et les arrivées quotidiennes se poursuivent.
La situation est telle qu’elle a forcé l’administration Biden, qui avait promis de mener une politique migratoire « saine et humaine », à renouer avec l’une des conduites les plus controversées de son prédécesseur : le maintien en rétention de mineurs. Elle a dû rouvrir les centres qu’elle s’était promis de fermer, provoquant la fureur de l’aile gauche du parti. De nouveau, les médias américains ont rapporté les histoires de centaines d’enfants massés dans des camps de rétention surpeuplés en pleine pandémie, dormant par terre à tour de rôle, incapables de prendre une douche pendant des jours ni même de contacter leurs parents.
Les témoignages rapportés par CNN sur le centre de Donna, au Texas, sont terribles : « Les enfants étaient terrifiés, pleuraient et craignaient de ne pas pouvoir parler avec les membres de leur famille », ont raconté des avocats qui ont pu avoir accès aux enfants. « Certains ont dit qu’ils n’avaient pas vu la lumière du soleil depuis des jours. D’autres ont dit que s’ils avaient de la chance, ils sortaient pendant vingt minutes tous les deux-trois jours. » « Donna devient rapidement une crise humanitaire », a déclaré Leecia Welch, directrice d’une association de protection des droits de l’enfant. « Nous comprenons que l’administration a hérité de cette catastrophe, mais je ne saurais trop insister sur l’urgence de la situation avec le nombre croissant de jeunes enfants non accompagnés. »
Débordé, le gouvernement a ordonné samedi à l’agence américaine de gestion des situations d’urgence (FEMA) d’intervenir. Pendant trois mois, elle aidera à héberger temporairement les mineurs avant qu’ils ne rejoignent des adultes, généralement des proches déjà installés aux États-Unis. Signe de l’urgence, la FEMA a loué un espace dans un palais des congrès de Dallas pour loger temporairement jusqu’à 3.000 adolescents d’entre 15 et 17 ans, a indiqué un élu municipal de Dallas sur Facebook, J.J. Koch, en précisant que l’agence espérait l’ouvrir « dès cette semaine ».
Toutes les administrations américaines connaissent des pics, souvent saisonniers, d’arrivées de migrants. Mais pour le chef de la minorité républicaine à la Chambre des représentants, Kevin McCarthy, « cette crise a été créée par les politiques présidentielles de la nouvelle administration ». « Elle ne peut avoir d’autre nom que la crise Biden aux frontières », a-t-il lancé lors d’une visite au Texas, à la frontière avec le Mexique, en compagnie d’une dizaine d’autres élus républicains de la Chambre. « C’est ici que vous devriez venir à bord d’Air Force One, c’est ici que vous devriez regarder les gens dans les yeux et parler aux agents chargés de la police des frontières », a-t-il lancé à l’intention du président démocrate. Tout cela a encouragé les migrants à tenter leur chance, affirment les républicains.
Au Texas, la situation est tendue. Selon les associations locales, quelque 200 migrants sans papiers sont passés par la gare routière de Brownsville dans la seule journée de samedi. « À la maison, on n’a pas de travail, pas d’argent », confie Rubia Tabora, Guatémaltèque âgée de 25 ans, assise avec son fils d’un an à la gare routière de Brownsville, à la pointe sud du Texas. Elle a franchi clandestinement la frontière depuis le Mexique et veut retrouver son époux, qui vit déjà aux États-Unis. L’annonce de la signature d’un moratoire sur les expulsions par Joe Biden l’a encouragée à passer la frontière. « Mon mari m’a dit de venir à ce moment-là », a expliqué la jeune femme dimanche soir à l’AFP. Contacté lundi par l’agence de presse, le maire de Brownsville, Trey Mendez, relativise, affirmant que ses services n’étaient pas débordés par les quelque 150 migrants qui arrivent chaque jour, la plupart quittant les lieux sous 24 heures. « Je n’ai pas le sentiment que nous traversions une crise à Brownsville », a déclaré aux journalistes celui qui avait soutenu Joe Biden pour l’élection présidentielle.
La Maison Blanche a tout de même reconnu lundi qu’elle faisait face à un « gros problème » mais en a attribué la responsabilité à Donald Trump, qui a quitté le pouvoir le 20 janvier après quatre ans de mandat. « La dernière administration nous a laissé un système démantelé et impraticable », a déclaré la porte-parole de la Maison Blanche Jen Psaki, lors d’une conférence de presse. « Nous allons tout faire pour trouver une solution », a-t-elle ajouté. Les démocrates accusent les républicains de chercher à faire « diversion » pour ne pas parler du gigantesque plan de relance économique qu’ils viennent d’approuver, très populaire auprès des Américains. Et ils soulignent que le nombre de clandestins appréhendés à la frontière avec le Mexique était reparti à la hausse au printemps 2020, soit sous le mandat Trump. Alors que des parlementaires républicains disaient lundi avoir le « cœur brisé » par la situation, ils ont vité été rappelés au souvenir des images d’enfants parqués dans des cages, dans des hangars, au plus fort de la politique de « Tolérance Zéro » de Donald Trump.
Source : Le Figaro