En Birmanie, la junte intensifie la répression

Des affrontements toujours plus meurtriers opposent les manifestants à l’armée qui a décrété la loi martiale à Rangoun et à Mandalay.

Les épaisses fumées noires s’élevaient encore haut dans le ciel de Rangoun lundi après-midi. La veille, le quartier industriel de Hlaing Tharyar, dans la banlieue ouest de la capitale économique birmane, a été le théâtre d’affrontements entre forces armées et manifestants, parmi les plus sanglants depuis le coup d’État du 1er février. Accusant la Chine de soutenir la junte militaire contre laquelle ils s’opposent, certains manifestants ont volontairement incendié plusieurs dizaines d’entreprises chinoises implantées dans ce quartier pauvre de la ville.«Trente-deux usines chinoises ont été vandalisées durant les attaques, avec un préjudice de 240 millions de yuans (36,89 millions de dollars)», indiquait lundi le média d’État chinois Global Times, ajoutant que deux ressortissants chinois avaient été blessés dans ces incendies.

Face aux manifestants, les militaires de la Tatmadaw, surnom donné à l’armée birmane, ont ouvert le feu. Au moins 22 civils ont perdu la vie à Hlaing Tharyar. Auxquels s’ajoutent 16 décès dans différentes villes du pays, ainsi que celui d’un policier, le deuxième depuis le coup d’État. Ces 39 morts font de dimanche la journée la plus sanglante depuis le début du mouvement de désobéissance civile qui s’est emparé de la société birmane ces six dernières semaines. Ils portent à 138 le bilan humain officiel de la répression.

Escalade dans la violence

Mais la perspective de l’escalade dans la violence se profile. Après avoir décrété la loi martiale dans deux quartiers de Rangoun dimanche soir, la junte militaire a fait savoir lundi matin que cinq autres de l’ex-capitale étaient désormais concernés, ainsi que certains quartiers de la ville de Mandalay, 600 kilomètres plus au nord. Lundi, des images montraient un impressionnant cortège composé de plusieurs dizaines de camions militaires se rendant à Hlaing Tharyar pour réprimer les manifestations qui s’y poursuivaient. Au moins 11 morts étaient à déplorer dans le pays.

Craignant l’amalgame avec les entrepreneurs chinois, Taïwan, qui ne dispose d’aucune représentation diplomatique locale, conseillait à ses investisseurs implantés en Birmanie de dresser les drapeaux rouge et bleu de l’île, ainsi que des messages en birman portant la mention«Entreprise taïwanaise» pour«éviter tous malentendus». Dans un communiqué, l’ambassade de Grande-Bretagne, l’ancienne puissance coloniale, appelait dimanche le régime militaire«à cesser immédiatement cette violence et à rendre le pouvoir à ceux démocratiquement élus par le peuple du Myanmar». Aux législatives de novembre, la Ligue nationale pour la démocratie (LND), le parti d’Aung San Suu Kyi, était arrivée largement en tête, avec plus de 80 % des voix. Mais la «dame de Rangoun», désormais en résidence surveillée dans la capitale, Naypyidaw, est poursuivie pour au moins quatre chefs d’accusation: importation illégale de talkies-walkies, non-respect des restrictions liées au coronavirus, violation d’une loi sur les télécommunications et incitation aux troubles publics.

Une audience en ligne devait se tenir lundi mais n’a pas pu avoir lieu du fait de problèmes de connexion internet. Elle est remise au 24 mars.

Source : Le Figaro

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