Le président tunisien, Kaïs Saïed, a exprimé son refus de l'ingérence des magistrats dans son initiative visant la révision et la réforme du système judiciaire.
Le locataire de Carthage a également rejeté le qualificatif de « coup d’Etat » s'agissant des mesures d’exception décrétées le 25 juillet dernier.
Saïed s’exprimait lors de la réunion du Conseil des ministres qu’il présidait ce jeudi au Palais présidentiel de Carthage dans la capitale, Tunis. Cette allocution a été mise en ligne sur la page « Facebook » officielle de la Présidence de la République tunisienne.
Le Conseil supérieur de la magistrature (CSM - instance constitutionnelle, indépendante) avait annoncé, mercredi, dans un communiqué, son « refus de la révision et de la réforme du système judiciaire par voie de décrets présidentiels », appelant les juges « à s'attacher à leur indépendance ».
Le président tunisien a exprimé son mépris face aux magistrats qui évoquent un « coup d’État ».
« Le devoir de réserve du juge l'oblige à observer le silence et à appliquer la loi de façon impartiale », a-t-il déclaré.
En décembre dernier, le magistrat Ahmed Rahmouni avait écrit dans un post publié sur le réseau social Facebook : « je ne sais si tout le monde a enfin saisi l'approche de Kaïs Saïed s’agissant de mener un coup d'État rampant contre les institutions de l'État avec l’appui des forces sécuritaires et militaires ».
« Il y a un seul et unique législateur et non des milliers », a martelé Saïed, indiquant qu'un décret « portant sur la réconciliation pénale (avec les corrompus) sera émis dans les prochains jours afin de restituer l'argent spolié au peuple ».
Et le chef de l’Etat tunisien d’ajouter : « Quiconque aurait commis un crime ou une infraction contre le peuple tunisien en matière d’environnement, de santé ou encore d’éducation, doit être impérativement traduit devant la justice ».
« Ils tentent de porter atteinte à l’autorité de l'Etat (..) Ils croient qu'ils sont l’Etat », a déclaré le locataire de Carthage, et d’ajouter : «L'Etat des juges n’existe pas, ils sont des juges au service de l’Etat », a souligné Saïed.
Depuis un certain temps, l’indépendance de la justice fait débat dans les milieux des droits de l'homme en Tunisie, notamment à la lumière des déclarations de Kaïs Saïed dans lesquelles il considère la justice, non comme un organe de l’Etat mais plutôt comme une « fonction parmi d’autres de l'État », faisant planer le spectre d’une possible dissolution du CSM.
En octobre dernier, la ministre de la Justice, Leila Jaffal, avait annoncé qu'un projet de loi relatif au CSM était en cours d’élaboration, une initiative qui avait provoqué l’ire de nombreux magistrats.
Les magistrats perçoivent cette initiative comme une forme d’ingérence dans le système judiciaire, alors que Kaïs Saïed a fait observer de son côté, que les magistrats seront associés à l’élaboration dudit projet.
Au cours des derniers mois, Saïed a fait plusieurs déclarations au sujet de la justice et des magistrats dans son pays. Le locataire de Carthage avait affirmé notamment que « La justice est celle de l'Etat tunisien, elle est indépendante et n’obéit qu’à la loi », soulignant que « le peuple tunisien veut assainir le pays et cela ne peut se faire sans une justice équitable et des magistrats au-dessus de tout soupçon ».
Source : AA