Le Président tunisien Kaïs Saïed a demandé à la ministre des Finances, Sihem Boughdiri Nemsia, de procéder à un « audit global » des dons et prêts obtenus par la Tunisie au cours des dernières années, pour savoir « où sont passés ces fonds ».
C’est ce qui ressort de son allocution prononcée jeudi, à l’entame du Conseil des ministres au Palais de Carthage, en présence de la cheffe du gouvernement Najla Bouden Romdhane, selon un communiqué et une vidéo de la Présidence Tunisienne, consultés par le correspondant de l’Agence Anadolu.
« Il est impératif de savoir ce qu’il est advenu des prêts accordés par des pays étrangers (…) des milliards ont été injectés en Tunisie, sans qu’ils n’aient le moindre impact sur la réalité et que chacun assume ses responsabilités à ce propos », a déclaré le chef de l’Etat.
Et le locataire de Carthage de s’interroger « Où est passé l'argent du peuple tunisien ? Revoyez certaines des déclarations d'un certain nombre de pays (non spécifiés) qui ont accordé des prêts à la Tunisie. Où sont passés ces prêts accordés tout au long de la dernière décennie ? Et après ils (les opposants aux mesures d’exception) osent parler de révolution et de justice sociale ».
« Un audit doit être effectué, et je demande à la ministre des Finances de réaliser un audit global de tous ces fonds, pour savoir où sont-ils passés », a souligné Saïed, précisant, « une partie de ses fonds a été transférée à l’étranger (sans mentionner de destination précise, ni la partie qui a assuré ou effectué ce transfert), mais cet argent revient au peuple et doit lui être restitué ».
Le Président tunisien a appelé la justice à « s’acquitter pleinement de son rôle et à ne pas hésiter à appliquer la loi à tous, sans exception et sur un pied d’égalité ».
Il n'y a pas de chiffres précis relatifs aux dons et prêts obtenus par la Tunisie depuis la révolution de 2011 qui a renversé l'ancien président Zine El Abidine Ben Ali.
Cependant, l'ancien président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, a déclaré lors d'une visite en Tunisie en 2018, que l'Union européenne à elle seule avait accordé à la Tunisie une aide de 10 milliards d'euros, au cours des sept premières années après la révolution de 2011.
La Tunisie est en proie à une grave crise politique depuis que Kaïs Saïed avait décidé le 25 juillet de révoquer le Chef du gouvernement Hichem Mechichi, geler les pouvoirs du Parlement pour une durée de 30 jours, et de lever l’immunité des députés, dans le cadre de mesures d’exception. Le chef de l’Etat avait annoncé également qu’il s’arrogeait le pouvoir exécutif avec l’aide d’un gouvernement dont il désignera le chef.
Le locataire de Carthage avait décidé le 22 septembre de supprimer l'instance provisoire de contrôle de la constitutionnalité des projets de loi, et de légiférer par décrets présidentiels.
La majorité des partis a rejeté les décisions de Saïed, prorogées sine die en date du 24 août écoulé. Certains partis ont qualifié ces décisions de « coup d’Etat contre la Constitution », tandis que d’autres formations politiques y ont été favorables, estimant qu’il s’agit d’une « restauration du processus révolutionnaire », sur fond de crises politiques, économiques, et sanitaires (Covid-19).
Le processus de transition démocratique en Tunisie a été amorcé après qu'une révolution populaire a renversé en 2011 le régime du président de l'époque, Zine El Abidine Ben Ali (1987-2011).
Sur un autre plan, le président tunisien a fait observer que « le continent africain endure la pauvreté et les guerres depuis des décennies, et il est temps aujourd'hui de mettre un terme à ces situations qui ne cessent d'empirer ».
Kaïs Saïed s’exprimait en visioconférence lors d'une séance de débat de haut niveau du Conseil de sécurité sur la coopération entre les Nations Unies et les organisations régionales ayant pour thème, « l’Union africaine (UA), renouveler la solidarité pour assurer avec succès la paix et la sécurité dans un environnement de conflit en mutation», diffusée sur la page officielle Facebook de la Présidence Tunisienne.
« Nous devons revoir certaines des méthodes qui ont été adoptées (pour faire face à la situation en Afrique) et examiner les causes réelles derrière la persistance de ces situations », a préconisé le président tunisien.
Source : AA