Russie: à Moscou, manifestation pour dénoncer des «fraudes massives» aux législatives

Plus d'un millier de personnes, à l'appel du Parti communiste de la fédération de Russie (KPRF), ont défilé dans la capitale russe.

Au départ, ce devait être une « rencontre avec les élus », formule couramment invoquée pour organiser une manifestation non-autorisée.

De fait, plus d'un millier de personnes se sont rassemblées samedi dans le centre de Moscou à l'appel du Parti communiste de la fédération de Russie (KPRF) pour dénoncer des « fraudes massives » aux élections à la Douma des 17-19 septembre.

Sur la place Pouchkine noire de monde, des figures du Parti ont harangué une foule compacte mais calme, tel Valéri Rachkine, tête d'affiche communiste à Moscou qui a critiqué une « fraude électorale colossale » dans la capitale. Le parti au pouvoir, Russie Unie, a « volé les sièges des députés », a martelé Valéri Rachkine, tenant de l'aile « dure » du KPRF. Celui-ci, avec 57 députés (+15 par rapport à l'Assemblée élue en 2016), se place au deuxième rang, derrière Russie unie (324 députés, contre 343 précédemment), parmi les cinq partis autorisés à siéger à la Douma, tous plus ou moins acquis à la cause du Kremlin.

Si quelques arrestations ont eu lieu au début de la manifestation, la réaction de la police a surtout consisté à « noyer » les discours sous un flot de musique craché à plein volume par de puissants haut-parleurs…

Le vote électronique en cause

La colère des électeurs du KPRF, rejoints par nombre de partisans de l'opposition dite « hors système » - dont Alexeï Navalny, emprisonné depuis huit mois, est la figure de proue-, a été déclenchée par les manipulations suspectées lors du vote électronique.

Dans six régions du pays, le vote à distance (depuis un ordinateur) était possible, ainsi qu'à Moscou où 1,9 million d'électeurs (sur 7 millions d'inscrits) l'ont utilisé. Mais alors que le vote électronique était censé être rapide et fiable, les résultats finaux n'ont été connus dans la capitale que le lendemain matin du scrutin, et donné lieu à de bien curieuses « corrections ».

Ainsi, alors que l'opposition, notamment communiste, était en tête dans neuf circonscriptions sur quinze avec 99% des bulletins dépouillés, « Russie unie », où ses alliés, l'ont finalement emporté partout après l'injection du vote électronique dans les résultats…

Selon l'opposition, il s'agissait pour le pouvoir de contrecarrer le « vote intelligent », la stratégie mise en place par les partisans de Navalny appelant à voter en faveur des candidats les mieux placés pour battre « Russie unie », soit souvent des communistes.

Devant le tollé, un recompte du vote électronique aura bien lieu, et un rapport est prévu à la fin de l'année, mais sans incidence possible sur les résultats officiels, a-t-on d'ores et déjà prévenu. A l'issue d'un scrutin quasiment taillé sur mesure, « Russie unie » conserve donc sa majorité des deux tiers, suffisante pour réviser la Constitution.

Selon les observateurs, les « rectifications » apportées aux résultats auraient permis de minimiser la dégradation dans l'opinion de l'image de « Russie unie » et d'endiguer la progression du KPRF qui risquait de devenir un opposant trop puissant. Au niveau national, « le soutien réel des communistes est estimé à environ 30%, alors que leur score officiel est de 18,9% ; de son côté « Russie unie » n'obtiendrait en fait que 35% alors que son résultat est de 49,2% », souligne Andreï Kolesnikov, du centre Carnegie de Moscou.

Samedi, au moment où se tenait la manifestation, Vladimir Poutine rencontrait les chefs des cinq partis ayant remporté des sièges au parlement, dont celui du Parti communiste, Guennadi Ziouganov. Le maître du Kremlin a salué à cette occasion la « victoire convaincante » de Russie unie.

Source : Le Figaro

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