La politique russe en mer Noire et en mer du Japon : des ponts vers nulle part

L’État russe a démontré de façon spectaculaire ses politiques extérieures, de voisinage et maritimes par la tentative d’annexion et l’occupation de la péninsule de Crimée. Ces actions ont permis aux Russes d’utiliser la Crimée comme « porte-avions insubmersible » pour l’expansion militaire russe dans les régions de la mer noire, méditerranéenne, ainsi que le Proche-Orient et en Afrique.

La politique russe sur la péninsule permet de reconstruire l’économie de la Crimée par une restructuration totale du secteur militaire. Des projets d’infrastructure ambitieux ont été réalisés à cet effet, comme le pont qui traverse le détroit de Kertch, l’autoroute de Tavrida, ainsi que deux centrales thermiques. Certaines usines de Crimée ont reçu des commandes de construction de navires et d’équipements pour l’armée et la marine russes et la Russie accorde une grande attention à l’extraction du gaz du plateau de la mer Noire. La flotte russe de la mer noire est devenue la structure de la marine russe la plus développée au XXIe siècle. Mais en même temps, d’autres secteurs économiques en Crimée se dégradent.

 L’occupation de Crimée étant illégal – toute coopération avec les États de la mer Noire est impossible tant que le conflit interétatique ukrainien-russe n’est pas résolu. La Russie n’a donc que des lignes de front avec les autres Etats de la région. La Russie rejette toute négociation officielle, liée aux questions de Crimée et tente de parier la reconnaissance de sa propre « souveraineté » sur la péninsule dans les traités bilatéraux ou collectifs et les activités organisationnelles dans les domaines de la pêche, de l’écologie, du transport maritime.

Ces questions ont été illustrées dans les activités de la Commission ukraino-russe liées à la pêche dans la mer Azov, dans le protocole d’accord de la mer Noire et dans les travaux du bureau de Moscou du Comité international de la Croix-Rouge. Mais dans le même temps, l’Ukraine a engagé des procédures judiciaires internationales relatives aux droits de l’homme en Crimée devant la Cour européenne des droits de l’homme, à la discrimination raciale liée à la Crimée devant la Cour internationale de justice, et a intenté des poursuites devant des arbitres internationaux pour violation du droit international maritime et des investissements. Dans ces institutions, comme dans la Cour pénale internationale, la Russie doit négocier avec l’Ukraine concernant le problème de la péninsule.

Et en 2020, la Russie a adopté des modifications à sa Constitution, interdisant « l’aliénation du territoire russe » et toute négociation sur cette question. Bien sûr, ceci n’a de l’importance que pour la politique intérieure russe, car les constitutions ne peuvent pas être en contradiction avec les obligations internationales.

Mais politiquement, les proclamations de « l’intégrité territoriale » russe n'illustre pas seulement l’exemple de la Crimée, mais aussi le conflit lié aux Territoires du Nord.

Cela nous permet de comparer la politique de la Russie en mer Noire et en mer du Japon. Deux ponts qui sont l’analogie parfaite de cette politique – le pont de Kertch, construit par la Russie reliant les territoires russes à la Crimée et le pont de Sakhaline, unissant cette île à la Sibérie.

Il est intéressant de noter qu’avant l’occupation de la Crimée, la Russie ait annoncé, le pont de Lena reliant les régions de Sakha (Yakoutie) par chemin de fer à la Russie centrale, comme projet prioritaire, a intérêt commercial. Mais maintenant, le Pont Lena s’est arrêté non seulement pour concentrer les efforts sur le pont de Kertch, mais aussi pour le pont de Sakhaline.

Tout comme le projet du pont de Kertch, le projet de Sakhaline n’a aucune valeur commerciale pour l’Etat, leur objectif principal est de faciliter les éventuelles opérations militaires russes. De plus, la Russie utilise des manipulations similaires pour étendre son propre contrôle en mer Noire, le Japon et la mer d’Okhotsk, La Russie exige reconnaissance de sa « souveraineté » sur Itouroup comme condition pour l’autorisation d’accès aux droits légitimes des autres États dans l’utilisation des mers pour le commerce, la navigation et la pêche.

 Ainsi, les États voisins russes n’ont qu’un seul moyen efficace pour défendre leurs intérêts légitimes – travailler sur la coopération avec toutes les nations sur la base du droit international et des droits d’autodéfense économique, sécuritaire et humanitaire. Une telle coopération reflétera de manière pragmatique les risques régionaux actuels et permettra d’élaborer les modèles de contre-mesures.

Source : La Tribune de Los Angeles

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