Les organisations non gouvernementales ont également appelé à « la neutralité de l'institution militaire, à la tenir à l’écart des tiraillements politiques et à cesser de recourir à la justice militaire pour juger des civils ».
Des organisations tunisiennes de défense des droits humains ont appelé samedi le Président Kaïs Saïed à déterminer la durée des « mesures d’exception » et à organiser un dialogue national sur les moyens de réaliser des réformes politiques dont le pays a besoin.
C’est ce qui ressort d’un communiqué conjoint signé par 21 associations et organisations (non gouvernementales), consulté par l’Agence Anadolu.
Les associations et organisations de la société civile en Tunisie, ont indiqué qu'elles appelaient le Président Saïed à « fixer la durée des mesures d’exception », qu'il avait annoncées le 25 juillet, pour une durée de 30 jours, avant de les proroger « sine die » le 24 août « jusqu’à nouvel ordre ».
Le 25 juillet dernier, le Président Saïed avait décidé de suspendre les travaux du Parlement, présidé par Rached Ghannouchi, chef du mouvement Ennahdha, de lever l’immunité parlementaire dont bénéficiaient les députés et de limoger le Chef du gouvernement, Hichem Mechichi. Kaïs Saïed s’est octroyé le pouvoir exécutif qu’il dirigera avec l’aide d’un gouvernement, dont il nommera le chef.
Dans leur communiqué conjoint, les associations et organisations ont également exhorté Saïed à « lancer un dialogue national avec la participation de toutes les parties, notamment les partis politiques, organisations et personnalités nationales, à l'exception de ceux qui sont impliqués dans des affaires de corruption dans le cadre d'un procès équitable, afin de réaliser la réforme politique, institutionnelle, économique et sociale dont la Tunisie a besoin ».
« Le maintien de l'état d'urgence, la prorogation des mesures d’exception et la concentration de tous les pouvoirs entre les mains du Président de la République, en l'absence d'une vision claire sur les prochaines étapes, alimentent les craintes vis à vis d’un réel danger qui pèse sur l'avenir de la démocratie en Tunisie », soulignent les 21 signataires.
Et le communiqué conjoint d’ajouter que « tous ces facteurs susmentionnés ne font qu’aggraver encore plus la situation, et envoyer des messages négatifs à tous les partenaires à l’intérieur et à l’extérieur et contribuent à l'isolement du pays ».
Les 21 organisations et associations ont également appelé à « la neutralité de l'institution militaire, à la tenir à l’écart des tiraillements politiques et à cesser de recourir à la justice militaire pour juger des civils ».
Il est également question « de respecter la séparation des pouvoirs, garantir l'indépendance de la justice et de revenir au Conseil supérieur de la magistrature, avant de prendre toute décision interdisant à un magistrat de voyager ou l’assignant à résidence », ajoute le communiqué.
Les organisations et associations ont exprimé leur profonde inquiétude « face aux campagnes d'arrestations, d'interdictions de voyager et d'assignations à résidence qui ont touché de nombreux parlementaires, hommes d'affaires et magistrats, ainsi que le placement en résidence surveillée de l’ancien président de l'Instance nationale de lutte contre la corruption (INLUCC) Chawki Tabib, sans fournir de justifications ni d'autorisations judiciaires».
Elles ont fermement condamné « l’évacuation et la fermeture manu-militari des locaux de l’INLUCC » faisant observer que « les dossiers déposés auprès de l’instance constitutionnelle contiennent des informations sensibles et des données personnelles censées être protégées ».
Les 21 organisations et associations ont souligné à cet effet « la nécessité de prendre les précautions nécessaires pour protéger l'identité des lanceurs d'alerte qui ont déposé des dossiers auprès des services de l’INLUCC, comme le stipule la loi ».
Parmi les signataires du communiqué figurent, l’organisation « 23/10 pour l'appui de la transition démocratique », l’association « Yakadha (Vigilance) pour la Démocratie et l'Etat Civil », le « Comité pour le Respect des Libertés et des Droits de l'Homme en Tunisie » (CRLDHT), « l'Association Tunisienne de Défense des Libertés Individuelles » (ADLI), et le « Centre de Tunis pour la liberté de la presse » (CTLP).
Certains partis politiques, ont considéré les mesures d’exception du chef de l’État tunisien comme un « coup d’Etat contre la Constitution », tandis que d'autres y ont été favorables, estimant qu'il s'agissait d'une « rectification du processus révolutionnaire ».
Source : AA