Des violences à Rangoun entre opposants et partisans de la junte militaire en Birmanie

Jeudi, des centaines de partisans des militaires auteurs du putsch du 1er février ont défilé dans le centre de la plus grande ville de Birmanie.

Dans une soudaine montée de la tension en Birmanie, des partisans de la junte militaire armés de tuyaux et de lance-pierres ont affronté jeudi 25 février des habitants de Rangoun. La colère contre les généraux auteurs du putsch du 1er février secoue le pays, avec des manifestations quotidiennes de plus ou moins grande ampleur pour réclamer la libération d’Aung San Suu Kyi, l’ex-chef du gouvernement civil, et le retour à la démocratie.

Jeudi, des centaines de partisans des militaires, portant des pancartes sur lesquelles était inscrit « Nous soutenons nos forces de défense », ont défilé dans le centre de la plus grande ville de Birmanie.

Les autorités leur ont donné accès à l’emblématique pagode Sule, un carrefour-clé de Rangoun, qui ces derniers jours a été barricadé pour empêcher les manifestants dénonçant le coup d’Etat de s’y rassembler. Les riverains ont commencé à frapper sur des casseroles et des marmites, un acte devenu un symbole de la résistance contre la junte, pour protester contre la manifestation en faveur des militaires.

A midi, des affrontements ont éclaté aux abords de la gare centrale de Rangoun. Des partisans des militaires – certains armés de bouts de tuyaux, de couteaux et faisant usage de lance-pierres – se sont retournés contre les habitants qui les huaient.

Lorsque la police est arrivée, des femmes et des enfants se sont tenus par le bras pour constituer un bouclier humain, craignant que les forces de l’ordre ne tentent d’arrêter des habitants. Mais après un moment de tension, la police a finalement écarté les assaillants.

Salut à trois doigts

Autour des principales artères de circulation, les habitants de Rangoun brandissaient des poignées de billets au passage des militants partisans des militaires, les accusant d’être payés par l’armée pour manifester.

Plus loin dans la ville, sur le campus verdoyant de l’Université de Rangoun, les étudiants ont défilé pacifiquement, portant les drapeaux rouges de la Ligue nationale pour la démocratie, le parti d’Aung San Suu Kyi. La lauréate du prix Nobel de la paix, 75 ans, est tenue au secret depuis son arrestation.

Des membres du personnel médical ont également défilé. « Nous voulons voir ce gouvernement illégitime tomber », a déclaré un pharmacien. La « révolution des blouses blanches » fait partie du vaste mouvement de désobéissance civile contre la junte. Les Birmans rivalisent d’ingéniosité dans leur rébellion contre la junte, et jeudi, dans diverses villes du pays, les manifestants se sont peints sur les joues le salut à trois doigts, leur signe de ralliement, à l’aide de thanaka, une pâte cosmétique naturelle.

Depuis le début du mois de février, la police a utilisé des gaz lacrymogènes, des canons à eau et des balles en caoutchouc contre les manifestants. Des tirs isolés à balles réelles ont également eu lieu. Le nombre de morts depuis le coup d’Etat est monté à cinq mercredi, après le décès d’un homme de 20 ans qui a succombé à ses blessures à Mandalay. L’armée, de son côté, a signalé qu’au moins un policier avait trouvé la mort.

Plus de 720 personnes ont, par ailleurs, été arrêtées depuis le putsch, selon l’Association d’aide aux prisonniers politiques, dont un économiste australien, Sean Turnell, un conseiller d’Aung San Suu Kyi.

Le Royaume-Uni a, de son côté, annoncé des sanctions contre six responsables de la junte, dont Min Aung Hlaing, qui sont désormais interdits de séjour sur le sol britannique et de faire des affaires avec des entreprises britanniques. La Banque mondiale a, elle, annoncé suspendre toutes ses aides à la Birmanie, qui se sont élevées à environ 900 millions de dollars (735 millions d’euros) en 2020. Les montants demandés par le pays depuis le 1er février, date du putsch, ne seront ainsi pas honorés.

Source : Le Monde avec AFP

De la même section International