Le mouvement tunisien Ennahdha s’est déclaré, vendredi, favorable à l’organisation d’élections législatives et présidentielle anticipées, en cas de la non tenue du « Dialogue national » pour sortir de la crise politique que traverse le pays.
Le porte-parole d’Ennahdha (53 sièges sur 217 au Parlement), Fathi Ayadi, a déclaré à l'Agence Anadolu que « la position du mouvement est claire au sujet du Dialogue national. Le parti souligne la nécessité d’opter pour ce choix et appelle l'Union générale tunisienne du travail (UGTT) à mettre en œuvre son initiative et se tient aux côtés de la Centrale syndicale dans cette voie ».
Le « Dialogue national » est une initiative lancée par l'UGTT (la plus grande organisation syndicale de Tunisie) début décembre dernier.
« Le pays endure une situation difficile sur tous les plans, économique, social, sanitaire et politique, et il n'y a pas d'autre issue que le Dialogue national et l’impératif de parvenir à un accord sur les priorités de la prochaine étape, à l’apaisement à tous les niveaux, et à intensifier la coopération entre les institutions de l'État pour relever tous les défis et mettre en œuvre les échéances urgentes », a estimé Ayadi.
Et le porte-parole du mouvement d'ajouter : « En cas de la non tenue du Dialogue national et si une issue à cette crise n'est pas trouvée, il devient impératif d'organiser des élections législatives et présidentielle anticipées et de convoquer le peuple aux urnes comme une alternative, même si Ennahdha estime que ce n’est pas la solution appropriée au regard de la situation sanitaire, économique et social du pays ».
Ayadi a expliqué que « l'organisation d'élections législatives et présidentielle anticipées peut avoir un coût financier et économique pour l'Etat et pour le citoyen tunisien qui attend des mesures sociales et économiques concrètes ».
Il a fait observer que « cette question nécessite encore d’être étudiée mais le mouvement est pour le moment favorable à l’organisation du Dialogue national pour trouver des solutions à la crise politique dans le pays ».
Les dernières élections législatives se sont tenues en Tunisie le 6 octobre 2019 et ont permis au mouvement Ennahdha de remporter la majorité en raflant 52 sièges sur 217, avant que deux députés indépendants ne rejoignent son bloc au Parlement, portant le nombre total à 54 élus, alors qu’un élu avait démissionné du bloc parlementaire du parti d’obédience islamique il y a des mois, réduisant le nombre de sièges du mouvement au Parlement à 53.
Le parti « Qalb Tounes » (« Au cœur de la Tunisie ») est arrivé deuxième aux législatives avec 38 sièges.
Le second tour de l’élection présidentielle a eu lieu le 13 octobre 2019. Kaïs Saïed avait été élu à la magistrature suprême avec 72,71 % des voix face au candidat Nabil Karoui qui a récolté 27,29 % des voix, et ce, après un premier tour qui s'est déroulé en septembre de la même année.
Selon la loi tunisienne, les prochaines élections législatives et présidentielle se tiendront 5 ans après les élections de 2019, soit en octobre 2024.
En réaction à l'annonce faite par Saïed selon laquelle il est disposé à superviser le Dialogue national, à condition que cette initiative ait pour objectif de changer le système politique, Ayadi a déclaré : « Quiconque veut engager un dialogue ne doit pas poser de conditions, et par conséquent, entamer un dialogue aux seules conditions de changer le système politique et la révision de la Constitution, n’est pas souhaitable à l’heure actuelle ».
Et le porte-parole d’Ennahdha d’expliquer, « Un tel dialogue (celui demandé par Saïed) risque de prendre beaucoup de temps et peut s'étendre sur deux ou trois ans, sans compter qu’il a besoin d’un modus operandi, pour impliquer tous les partis politiques et organisations de la société civile sans exception, ce qui exige également beaucoup de travail ».
En plus d’une grave crise économique exacerbée par les répercussions de la pandémie du coronavirus, la Tunisie souffre d'une crise politique, alors que des divergences prévalent entre le Président Kaïs Saïed et le chef du gouvernement, Hichem Mechichi, en raison d'un remaniement ministériel, opéré le 16 janvier dernier.
Malgré l’approbation du remaniement par le Parlement, Saïed refuse d’inviter les nouveaux ministres pour la prestation de serment, considérant que ledit remaniement était entaché de «violations», ce que Mechichi rejette.
Source: AA