Les tensions s’ajoutent à une profonde crise économique, née de la chute de la rente pétrolière et à l’impasse politique due au Hirak.
Le gouvernement algérien a durci le ton jeudi 6 mai face à la crise sociale qui ébranle le pays, en dénonçant « l’exploitation de l’activité syndicale par certains mouvements subversifs » quelques jours après avoir suspendu 230 pompiers pour avoir manifesté à Alger.
« Une exploitation de l’activité syndicale par certains mouvements subversifs visant à semer la “fitna” [sédition] a récemment été relevée », souligne un communiqué des services du premier ministre, tout en reconnaissant le droit de grève et les libertés syndicales garantis par la Constitution.
L’influente revue de l’armée El Djeich a fustigé cette semaine des grèves « suspectes », en avertissant que « la sécurité nationale [était] une ligne rouge », à l’approche des élections législatives convoquées le 12 juin.
« L’entêtement de certains à tenir des grèves à un moment suspect est la meilleure preuve que ceci ne peut s’inscrire que dans une tentative de semer le trouble pour réaliser des objectifs et des intérêts qui ne vont pas dans le sens de l’amélioration de la situation professionnelle et des droits des travailleurs », a écrit El Djeich.
Les autorités algériennes font face depuis plusieurs semaines à une multiplication des conflits sociaux, alimentés par un taux de chômage élevé (15 %) et une paupérisation de larges franges de la société.
« Mauvaises pratiques », « complot »
Les tensions sociales s’ajoutent à une profonde crise économique, née de la chute de la rente pétrolière, et à l’impasse politique qui perdure depuis le soulèvement populaire antirégime du Hirak il y a deux ans.
Dans son communiqué, le gouvernement d’Abdelaziz Djerad incrimine certaines « mauvaises pratiques » prises durant les vingt ans de mandat de l’ancien président déchu Abdelaziz Bouteflika.
Cet avertissement des autorités survient à la suite de la suspension de 230 sapeurs-pompiers ayant manifesté dimanche avec des revendications salariales et socioprofessionnelles près du siège de la présidence à Alger. Une sanction qui a aussitôt mobilisé leurs collègues, menaçant de démission collective s’ils n’étaient pas réintégrés.
Le ministère de l’intérieur a qualifié la manifestation des pompiers de « complot » fomenté par « des parties hostiles à l’Algérie », une accusation récurrente contre toute voix dissidente.
Tandis que son ministre de l’intérieur Kamel Beldjoud maniait le bâton, le président Abdelmadjid Tebboune a appelé le gouvernement à ouvrir « un dialogue » avec les partenaires sociaux afin de tenter d’éteindre la colère sociale.
Dans une pétition relayée jeudi par l’agence officielle APS, un collectif piloté par des personnalités proches du pouvoir a exhorté le peuple algérien à « serrer les rangs » et à « se rassembler autour de l’Etat national, de son unité et sa souveraineté » face aux menaces de déstabilisation de l’Algérie.