Les autorités carcérales russes annoncent le transfert d’Alexeï Navalny à l’hôpital

L’opposant russe a arrêté de s’alimenter le 31 mars pour protester contre ses mauvaises conditions de détention.

Trois semaines après le début de sa grève de la faim, l’opposant russe Alexeï Navalny devait être transféré lundi 19 avril dans un hôpital pénitentiaire, ont annoncé les services carcéraux russes, qui jugent son état de santé « satisfaisant »« Une commission de médecins (…) a décidé du transfert d’A. Navalny vers une unité hospitalière pour les condamnés qui se trouve sur le territoire de la colonie pénitentiaire n°3 de la région de Vladimir », a rapporté le service carcéral de cette région dans un communiqué.

« L’état de santé d’A. Navalny est jugé satisfaisant actuellement, il est ausculté quotidiennement par un médecin thérapeute », affirme-t-il. Selon la même source, « avec l’accord du patient, il lui a été prescrit une thérapie vitaminée ». L’état de santé de l’opposant, qui selon ses partisans risque de graves problèmes cardiaques et rénaux pouvant entraîner la mort, est d’autant plus inquiétant qu’il a survécu il y a moins d’un an à un empoisonnement par une substance neurotoxique.

Alexeï Navalny a arrêté de s’alimenter le 31 mars pour protester contre ses mauvaises conditions de détention. Il accuse l’administration pénitentiaire russe de lui refuser l’accès à un médecin et à des médicaments, alors qu’il souffre d’une double hernie discale, selon ses avocats. Selon lui, il a par ailleurs été menacé d’être nourri de force, ce que les autorités russes peuvent décider d’imposer quand un prisonnier refuse de s’alimenter.

Risque d’arrêt cardiaque

Les annonces de lundi interviennent après que les partisans de M. Navalny ont estimé, ce week-end, que l’opposant risquait à tout moment de mourir. Des médecins proches de l’opposant ont dit craindre qu’il ne fasse un arrêt cardiaque « d’une minute à l’autre » en raison d’un niveau « critique » de concentration de potassium dans le sang. Ils ont appelé à le placer immédiatement en soins intensifs.

L’ambassadeur russe à Londres, Andreï Kéline, a affirmé que Moscou ne le laisserait pas « mourir en prison ». Les Européens, eux, ont adopté un langage de fermeté pour tenter de sauver l’opposant âgé de 44 ans, dont les partisans ont appelé à des manifestations massives dans toute la Russie mercredi soir.

L’Allemagne et la France ont demandé de manière « urgente » aux autorités russes de fournir un « traitement médical adéquat » dispensé par des médecins ayant « la confiance » d’Alexeï Navalny et réclamé sa libération immédiate.

Le chef de la diplomatie française, Jean-Yves Le Drian, a évoqué la « responsabilité majeure » du président russe Vladimir Poutine, et Washington a mis en garde le Kremlin contre des « conséquences si M. Navalny mourait ».

Mis en garde contre les manifestations du 21 avril

Le porte-parole du Kremlin a protesté lundi contre les mises en gardes des pays occidentaux qui ont promis une réponse ferme en cas de mort de l’opposant. « Nous ne pouvons pas accepter de telles déclarations de la part de représentants d’autres gouvernements », a-t-il déclaré aux journalistes, estimant que ce thème « ne doit pas avoir d’intérêt » pour eux. « Nous ne suivons pas l’état de santé des prisonniers russes », a ajouté M. Peskov.

Le ministère russe de l’intérieur a par ailleurs mis en garde les citoyens contre toute participation aux manifestations illégales prévues mercredi en soutien à M. Navalny. « Les unités du ministère de l’intérieur et des autres forces de l’ordre ne permettront pas une déstabilisation de la situation et prendront toutes les mesures qui s’imposent pour le maintien de l’ordre », a fait savoir le ministère dans un communiqué.

Vendredi, le bureau du procureur a par ailleurs demandé que les deux principales structures du camp Navalny (le Fonds de lutte contre la corruption et les « QG Navalny », qui regroupent des milliers de volontaires) soient classées comme « extrémistes » et donc interdites.

Jusque-là, la chasse aux partisans de M. Navalny se faisait de manière aléatoire, selon des motifs de plus en plus fantaisistes – depuis le non-port du masque jusqu’à des tweets « extrémistes » ou la publication de clips musicaux jugés « pornographiques ». Le classement comme organisation extrémiste rendrait cette lutte plus simple et plus systématique : toute « collaboration » avec une telle organisation peut être puni de six années de prison ; verser des dons, de huit ans. M. Navalny, qui présente un programme libéral classique, n’a jamais pu enregistrer un parti politique.

Source : Le Monde avec AFP

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