Le Mali a suspendu toutes les rotations de la Mission des Nations unies

Cette mesure concerne les contingents militaires et policiers et intervient quatre jours après l’interpellation de 49 militaires ivoiriens, des « mercenaires » selon Bamako.

Les autorités du Mali ont suspendu à partir de jeudi 14 juillet toutes les rotations des contingents militaires et policiers de la Mission des Nations unies au Mali (Minusma), y compris celles déjà programmées ou annoncées, a déclaré le ministère des affaires étrangères dans un communiqué.

Cette décision s’applique jusqu’à « l’organisation d’une réunion » par la partie malienne, dont la date n’a pas été communiquée, pour « faciliter la coordination et la réglementation » de la rotation de ces contingents, ajoute le communiqué. Les autorités maliennes justifient leur décision en invoquant le « contexte de sécurité nationale ».

Les autorités maliennes justifient leur décision, qui concerne les 12 261 soldats et 1 718 policiers déployés au Mali par une cinquantaine de pays contributeurs, en invoquant le « contexte de sécurité nationale ». 

Cette mesure intervient quatre jours après l’interpellation de 49 militaires ivoiriens, des « mercenaires » selon Bamako, qui les accusent d’avoir comme « dessein funeste » de « briser la dynamique de refondation » de l’Etat malien.

Selon Abidjan, ils étaient déployés au Mali en tant qu’éléments nationaux de soutien (ENS), une procédure de l’ONU permettant aux contingents des missions de maintien de la paix de faire appel à des prestataires extérieurs pour des appuis logistiques. Bamako assure la Minusma de travailler de « manière diligente en vue de réunir les conditions propices à la levée de cette mesure suspensive », déclare le communiqué.

Entrave à la liberté de mouvement

C’est un nouvel accroc diplomatique dans les relations entre le Mali et la Minusma, présente au Mali depuis 2013, qui vient d’avoir son mandat renouvelé pour un an le 29 juin. Ce renouvellement s’est accompagné d’une « opposition ferme » du Mali à la liberté de mouvement des Casques bleus pour des investigations liées aux droits de l’homme. 

Son ambassadeur à l’ONU Issa Konfourou avait notamment déclaré que Bamako « n’entend pas exécuter » les dispositions du mandat liées à la libre-circulation des Casques bleus pour des investigations sans feu vert préalable. « Les mouvements de la Minusma ne (pourront) se faire qu’avec l’accord des autorités » maliennes, avait-il dit.

Cette entrave à la liberté de mouvement officialisée fin juin remonte dans les faits à janvier, d’après des diplomates, période qui a coïncidé avec le déploiement au Mali de paramilitaires de la société privée russe Wagner.

Mi-janvier, le Mali avait suspendu pour quelques jours les opérations aériennes de la Minusma à la suite, selon elle, d’une réorganisation par les autorités maliennes du processus d’approbation des vols au-dessus du territoire en conflit. Des « discussions fructueuses » avaient permis la levée de cette suspension. 

Outre ses opérations dans le ciel malien, la Minusma effectue constamment des vols entre la sous-région et le Mali, notamment pour approvisionner ses Casques bleus, évacuer ses blessés, et dans le cadre de rotations de contingents.

Le 7 juillet, le chef de la Minusma El-Ghassim Wane avait affirmé en conférence de presse que la mission avait besoin du « soutien et (de) la coopération des autorités maliennes » appelant à un « dialogue constant » pour surmonter des « incompréhensions ».

Bras de fer diplomatique

Cette suspension intervient dans un contexte de bras de fer diplomatique qui dure depuis plusieurs mois entre Bamako et ses partenaires : la France, d’abord, que le Mali a poussée vers la sortie début 2022 après neuf ans de présence militaire dans le pays, via l’opération Serval puis Barkhane. Les derniers soldats français doivent quitter le Mali d’ici quelques semaines. 

Puis avec la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’ouest (Cédéao), qui a durant six mois durement sanctionné le Mali en raison du non-respect de ses engagements, notamment sur la question sensible du retour des civils au pouvoir. Les sanctions économiques et financières ont finalement été levées début juillet après la présentation d’un chronogramme électoral fixant le prochain scrutin présidentiel à février 2024. Bras de fer avec la Côte d’Ivoire, enfin, depuis dimanche après l’interpellation de 49 soldats à l’aéroport de Bamako.

Le Mali a été le théâtre de deux coups d’Etat militaires en août 2020 et en mai 2021. La crise politique va de pair avec un conflit qui ne cesse de s’aggraver depuis ses débuts en 2012. Les violences djihadistes se sont étendues vers le centre puis le sud du Mali, et aux Niger et Burkina Faso voisins.

Source : Le Monde avec AFP

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