RDC : les affrontements entre l’armée et le M23 sèment la terreur dans l’est du pays

Après le bombardement d’une école qui a tué deux enfants, le gouvernement congolais a haussé le ton, accusant le Rwanda de soutenir, financer et armer la rébellion.

Germain, 6 ans, et Isaac, 7 ans, étaient copains. Une bombe est tombée dans la cour de leur école, dans l’est de la République démocratique du Congo (RDC), pendant des combats entre l’armée et les rebelles du Mouvement du 23 mars (M23). Ils sont morts déchiquetés, victimes d’un conflit qui sème panique et terreur dans la région. Les deux enfants allaient à l’école Saint-Gilbert de Biruma, à environ 50 km au nord de Goma, à mi-chemin entre le chef-lieu du Nord-Kivu et Bunagana, un centre d’échanges commerciaux situé à la frontière ougandaise dont se sont emparés les rebelles du M23, lundi 13 juin.

Pour le bombardement de l’école de Germain et Isaac, vendredi dans le territoire de Rutshuru, l’armée congolaise a accusé le Rwanda d’être responsable de ce qu’elle a qualifié de « crime de guerre ». Pour la prise de Bunagana, elle a accusé le même pays d’« invasion » du territoire congolais, affirmant encore une fois que l’armée de Kigali combattait aux côtés des rebelles. Ce que le Rwanda dément. Mardi soir, le gouvernement congolais a haussé le ton, « condamnant la participation des autorités rwandaises dans le soutien, le financement et l’armement de cette rébellion » et promettant de défendre « chaque centimètre » de son territoire.

« Nous sommes fatigués de la guerre. Qu’ils nous donnent la paix afin que mes huit autres enfants puissent vivre et grandir ! », implore Sifa, 29 ans, la mère d’Isaac, assise devant sa maison. Son mari, Bigego, ne connaît pas son âge exact mais pense qu’il avait « peut-être 30 ans quand le M23 était ici en 2013 », ce qui lui en ferait 40 aujourd’hui. Rébellion à dominante tutsi née en 2012, le M23 avait brièvement occupé Goma avant d’être vaincu en 2013 par les Forces armées de RDC (FARDC) et les casques bleus de l’ONU. Il a repris les armes fin 2021, reprochant aux autorités congolaises de ne pas avoir respecté un accord pour la démobilisation et la réinsertion de ses combattants.

« On vit la peur au ventre »

Joseph Nziyunvira, le père de Germain, demande que « les pays développés aident le Congo, afin que justice soit faite et que le coupable soit puni ». Il accuse le Rwanda, même si, reconnaît-il, il n’est « ni un politicien, ni un militaire ». « Je suis un cultivateur, dit-il. Mais voilà, mon fils a été tué brusquement. Et nous avons encore peur car les combats continuent. » Non loin de sa maison, au milieu des bananiers, les tombes des deux enfants ont été creusées, des fleurs plantées. Les corps des petits garçons étaient si abîmés que leurs familles ont voulu les inhumer immédiatement. « Mais on ne pouvait pas aller au cimetière à cause des conditions de sécurité », expliquent leurs parents. 

Depuis ce bombardement, la population vit dans la terreur. « Les habitants dorment à l’extérieur, pendant trois jours il n’y a pas eu école, on vit la peur au ventre », déclare Floribert Hakizumwami, le chef de Biruma. A Katale, le village voisin, une école a également été bombardée, son toit de tôle transpercé, deux salles de classe complètement détruites. Il n’y a pas eu de victime, les bâtiments étant vides lors du bombardement.

Sur la route de Goma, les patrouilles de l’armée se sont intensifiées, des chars sont visibles. Mais la panique demeure. Dans le territoire voisin de Nyiragongo, où des combats ont opposé fin mai l’armée au M23, des dizaines de familles partent avec de maigres biens. « Je n’ai pas de destination fixe, je dois juste sauver ma vie », explique Elisabeth Nsengiyunva. « Les habitants de Gasiza, tout près du parc des Virunga, nous ont dit avoir vu les rebelles, qui leur ont dit qu’ils arrivaient et allaient tous nous tuer », ajoute, paniquée, la mère de famille.

Un officier de l’armée à Kibumba, à une vingtaine de kilomètres de Goma, déplore ces mouvements de population provoqués par des rumeurs, assure-t-il, colportées sur les réseaux sociaux.

Source : Le Monde avec AFP

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