Pékin appelle Washington à cesser de dénigrer la Chine

La passe d’armes médiatique continue. Le ministre chinois de la défense, Wei Fenghe, a déclaré, dimanche 12 juin, qu’il appartenait aux Etats-Unis d’améliorer les relations bilatérales entre Pékin et Washington, celles-ci ayant atteint un point critique.

S’exprimant lors du dialogue de Shangri-La, une conférence internationale sur la défense et la sécurité en Asie-Pacifique qui se tient à Singapour, M. Wei a répété à plusieurs reprises que la Chine ne recherchait que la paix et la stabilité, et n’était pas un agresseur. Il a appelé les Etats-Unis à « renforcer la solidarité et à s’opposer à la confrontation et à la division », souhaitant une relation sino-américaine « stable », qui, selon lui, est « vitale pour la paix mondiale ».

« Nous demandons à la partie américaine de cesser de dénigrer et de contenir la Chine. Cessez de vous immiscer dans les affaires intérieures de la Chine. Les relations bilatérales ne peuvent pas s’améliorer si les Etats-Unis ne font pas cela. »

Le ministre chinois a déclaré que la Chine rejetait fermement « les accusations et même les menaces [proférées par les] Etats-Unis » lors du discours prononcé, samedi à Singapour, par le secrétaire américain à la défense, Lloyd Austin. Ce dernier avait dénoncé l’activité militaire « provocatrice et déstabilisante » de Pékin près de Taïwan.

L’épineux dossier de Taïwan

Mais M. Austin avait également souligné l’importance de maintenir les « lignes de communication totalement ouvertes avec les responsables de la défense de la Chine » pour éviter les erreurs de calcul. Les deux hommes ont eu leur premier entretien en tête à tête en marge du sommet de Singapour vendredi, au cours duquel ils se sont affrontés au sujet de Taïwan. 

La Chine estime que cette île de 24 millions d’habitants, démocratique et autonome, est l’une de ses provinces historiques, même si elle ne la contrôle pas, et a accru la pression contre Taipei ces dernières années, menant par exemple des campagnes d’incursions dans la zone de défense aérienne de Taïwan. Ces actions ont accru les tensions avec les Etats-Unis, alors qu’elles sont déjà vives sur de nombreux autres plans.

« Nous allons nous battre à tout prix et nous allons nous battre jusqu’au bout » pour empêcher Taïwan de déclarer son indépendance, a insisté, dimanche, M. Wei. « C’est le seul choix possible pour la Chine », a-t-il ajouté. « Ceux qui poursuivent l’indépendance de Taïwan dans le but de diviser la Chine n’arriveront certainement pas à leurs fins », a-t-il déclaré, ajoutant que « personne ne devrait jamais sous-estimer la détermination et la capacité des forces armées chinoises à sauvegarder son intégrité territoriale ».

Le ministre chinois de la défense a accusé Washington de tenter de « détourner » le soutien des pays de la région Asie-Pacifique pour les retourner contre Pékin, affirmant que Washington cherche à faire avancer ses propres intérêts « sous couvert de multilatéralisme ».

La mer de Chine, autre sujet de tensions

Ce différend n’est que le dernier en date entre Washington et Pékin. La mer de Chine méridionale constitue un autre point chaud majeur dans la région. La Chine revendique la quasi-totalité de cette mer riche en ressources, par laquelle transitent chaque année des milliards de dollars d’échanges maritimes. 

M. Wei a insisté, dimanche, sur le fait que la Chine respectait la liberté de navigation et s’en est pris de manière voilée à Washington. « Une certaine grande puissance a longtemps pratiqué l’hégémonie de la navigation sous le prétexte de la liberté de navigation », a-t-il déclaré.

M. Wei a aussi fait savoir que la Chine, principal allié de la Corée du Nord, souhaitait la paix dans la péninsule coréenne après une récente série d’essais d’armement. « La clé pour [résoudre] le problème maintenant est de prêter attention aux intérêts en matière de sécurité de toutes les parties et de les satisfaire », a-t-il déclaré.

S’exprimant dimanche lors du sommet, le ministre sud-coréen de la défense, Lee Jong-sup, a précisé que Séoul renforcerait ses capacités de défense et collaborerait avec les Etats-Unis face à la menace du Nord.

Dissuasion nucléaire

Sur le thème de l’armement nucléaire, M. Wei, questionné sur les rapports faisant état de la construction de plus de cent nouveaux silos à missiles dans l’est de la Chine, a déclaré que Pékin avait « toujours poursuivi une voie appropriée pour développer des capacités nucléaires pour la protection [du] pays ». « La Chine a développé ses capacités pendant plus de cinq décennies. Il est juste de dire qu’il y a eu des progrès impressionnants », a-t-il lancé. « La politique de la Chine est cohérente. Nous utiliserons [ces armes] pour notre propre défense. Nous ne serons pas les premiers à utiliser des [armes] nucléaires », a-t-il ajouté. 

L’année dernière, le département d’Etat américain avait qualifié d’inquiétant le développement nucléaire de la Chine, et avait estimé qu’il semblait que Pékin s’écartait de plusieurs décennies de stratégie nucléaire fondée sur la dissuasion minimale.

Source : Le Monde avec AP, AFP et Reuters

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