Joe Biden assure que Vladimir Poutine « paiera les conséquences », alors que la Russie est accusée d’ingérence électorale

Après les propos du président américain, Moscou a rappelé son ambassadeur aux Etats-Unis et mis en garde contre une « dégradation irréversible » des relations entre les deux pays.

La Russie a annoncé, mercredi 17 mars, avoir rappelé son ambassadeur aux Etats-Unis pour consultations, tout en assurant vouloir éviter la « dégradation irréversible » de ses relations avec Washington. Cette décision de Moscou intervient quelques heures après des déclarations de Joe Biden sur Vladimir Poutine.

Dans un entretien, diffusé mardi par la chaîne américaine ABC, le président des Etats-Unis s’est vu demander s’il estimait que le maître du Kremlin était « un tueur ». Ce à quoi le démocrate a répondu : « Oui, je le pense. » Il n’a pas précisé s’il pensait à l’empoisonnement de l’opposant russe Alexeï Navalny en août 2020, imputé par les Etats-Unis à la Russie. Joe Biden a également promis que Vladimir Poutine paiera « le prix » de ses actes, notamment des ingérences électorales que lui reproche Washington.

  • Une « attaque » contre la Russie

Ce propos ont été dénoncés à Moscou comme une « attaque » contre la Russie et une « insulte » envers le peuple russe. Selon un communiqué du ministère des affaires étrangères, l’ambassadeur russe à Washington Anatoli Antonov a été rappelé « pour des consultations afin d’analyser ce qu’il faut faire et où aller en ce qui concerne les relations avec les Etats-Unis ».

« Pour nous, l’essentiel est de déterminer quels peuvent être les moyens de rectifier les relations russo-américaines, qui sont dans un état difficile et que Washington a amenées dans une impasse ces dernières années », a dit la diplomatie russe. Moscou assure vouloir « éviter leur dégradation irréversible », disant espérer que « les Américains sont conscients des risques ».

Viatcheslav Volodine, président de la chambre basse du Parlement et proche de Vladimir Poutine, a dénoncé mercredi « de l’hystérie due à de l’impuissance »« Une attaque contre [Poutine], c’est une attaque contre notre pays », a-t-il écrit sur son compte Telegram. « Avec ses déclarations, Biden a insulté les citoyens de notre pays », a-t-il ajouté.

Semblant vouloir éviter l’escalade dans l’immédiat, le département d’Etat américain a pris acte du rappel de l’ambassadeur russe mais n’a pas souhaité dire s’il envisageait d’en faire autant. « Tout en travaillant avec la Russie pour promouvoir les intérêts américains, nous allons tenir la Russie responsable pour chacun de ses actes néfastes », a déclaré une porte-parole de la diplomatie américaine, Jalina Porter.

  • Des relations tendues depuis des années

Le président Biden affiche depuis son arrivée à la Maison Blanche en janvier une grande fermeté à l’égard de Vladimir Poutine, par opposition avec la bienveillance souvent reprochée à son prédécesseur Donald Trump jusque dans le camp républicain.

Le parallèle avec l’ex-président est frappant. A un journaliste de la chaîne Fox News qui, en février 2017, lui affirmait que Vladimir Poutine était « un tueur », Donald Trump avait répondu par une pirouette, en invitant l’Amérique à un examen de conscience. « Pensez-vous que notre pays soit si innocent ? », avait-il demandé.

Pour autant, les relations entre la Russie et les Etats-Unis souffrent depuis des années de crises à répétition, de l’Ukraine à la Syrie en passant par des accusations d’ingérence électorale, d’espionnage ou, plus récemment, de cyberattaques.

  • Série de restrictions et de sanctions

Plus tôt mercredi, Washington avait annoncé étendre les restrictions d’exportation vers la Russie en réponse à l’empoisonnement de l’opposant russe Alexeï Navalny, dont les renseignements américains attribuent la responsabilité au Kremlin. Washington a déjà sanctionné début mars sept hauts responsables russes en réponse à cet empoisonnement.

Ces mesures n’améliorent pas « les chances d’une normalisation des relations », a réagi le vice-ministre russe des affaires étrangères, Sergueï Riabkov. « Les Etats-Unis seront pleinement responsables d’une nouvelle dégradation des relations russo-américaines, cela ne doit faire aucun doute », a-t-il estimé, cité par l’agence de presse étatique RIA Novosti.

  • De nouvelles ingérences électorales en 2020

Les déclarations de Joe Biden interviennent en outre alors qu’un nouveau rapport des services du renseignement américain, publié mardi, montre que Vladimir Poutine aurait dirigé des efforts pour tenter d’inverser le résultat du scrutin présidentiel de 2020.

Le chef du Kremlin « en paiera les conséquences », a prévenu Joe Biden au sujet de ces ingérences. Relancé un peu plus tard par le journaliste d’ABC sur la nature de la riposte américaine aux actes russes, il a ajouté : « Vous verrez bientôt le prix qu’il va payer. »

Ce rapport inclut de nouveaux éléments tendant à démontrer que Vladimir Poutine a supervisé ou, au minimum, ordonné une ingérence dans l’élection présidentielle américaine au profit de Donald Trump. Plus précisément, selon le document, des personnalités ukrainiennes soutenues par Moscou – comme le parlementaire Andrii Derkach – ont recruté des figures politiques aux Etats-Unis pour qu’elles « salissent » l’image de Joe Biden et de son fils Hunter Biden, cibles d’accusations répétées de corruption par Donald Trump.

Par ailleurs, le document dément le récit alternatif proposé par des alliés de Donald Trump selon lesquels la Chine a interféré dans le scrutin de novembre 2020 au profit de Joe Biden. « La Chine a cherché de la stabilité dans sa relation avec les Etats-Unis et n’a vu aucune des deux issues possibles au scrutin représenter un avantage suffisant pour qu’elle risque un retour de flammes si elle était prise sur le fait », est-il écrit.

Le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, a estimé que ce rapport était « incorrect, tout à fait sans fondement et sans preuves »« La Russie ne s’est pas ingérée dans les élections précédentes » de 2016, ni « dans les élections de 2020 », a-t-il assuré, estimant que ce rapport n’était qu’un « prétexte pour remettre à l’ordre du jour la question de nouvelles sanctions ».

Source : Le Monde avec Reuters

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