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- Le 22 Novembre 2024
Depuis plus de deux semaines, des manifestations sont organisées par des habitants d’Ispahan qui se plaignent de la terrible sécheresse, et qui reprochent aux autorités de détourner l’eau de la rivière Zayandeh Rud de cette ville du centre du pays, – à 400 km au sud de Téhéran –, pour approvisionner la province voisine de Yazd, qui manque aussi cruellement d’eau.
Pour la première fois, vendredi 26 novembre, la manifestation s’est accompagnée de heurts entre forces de l’ordre et protestataires. Nourodin Soltanian, porte-parole de l’hôpital universitaire d’Ispahan, cité samedi par l’agence de presse Mehr, a fait état de manifestants blessés, dont « deux dans un état grave ».
« Nous avons arrêté 67 des principaux auteurs et fauteurs de troubles », a déclaré un haut responsable de la police nationale, le général Hassan Karami, à l’agence de presse Fars. Il a fait état d’« environ 2 000 à 3 000 émeutiers lors des troubles de vendredi ». Les arrestations ont été menées par la police, les gardiens de la révolution, l’armée idéologique de la République islamique d’Iran et les services de renseignement.
Grenades lacrymogènes contre jets de pierres
Samedi, la ville d’Ispahan était calme, selon des témoins, et la police antiémeute y était déployée. « J’ai l’habitude de me promener dans le lit de la rivière avec des amies, mais aujourd’hui la police antiémeute est déployée en grand nombre près du pont Khadjou et elle demande aux habitants d’éviter ce secteur », a expliqué une quinquagénaire jointe par téléphone.
Vendredi, « après le départ des agriculteurs [du point de rassemblement], des opportunistes et des contre-révolutionnaires sont restés sur place », a affirmé le chef de la police d’Ispahan, Mohammad-Réza Mirheidari. Les services de sécurité ont « pu identifier et arrêter les personnes ayant détruit des biens publics ».
La police a tiré des grenades lacrymogènes sur les protestataires, qui ont riposté avec des jets de pierres, brisant les vitres d’une ambulance, et incendié une moto de la police, selon l’agence de presse Fars.
« En raison des jets de pierres et de l’utilisation de pétards et de bombes assourdissantes, certains de nos collègues ont été blessés. D’autres l’ont été par des tirs de fusils de chasse », a dit M. Mirheidari à la télévision. « Un policier a également été poignardé, mais son état est satisfaisant », a-t-il ajouté.
Une rivière à sec depuis 2000
La rivière Zayandeh Rud, qui traverse Ispahan, est à sec depuis 2000, sauf pendant quelques brèves périodes. Elle est devenue le principal lieu de rassemblement des manifestants. Selon M. Karami, « 30 000 à 40 000 agriculteurs et des habitants d’Ispahan ont participé aux rassemblements lors de la semaine dernière ».
Samedi, le journal ultraconservateur Kayhan a accusé « des voyous mercenaires d’avoir déclenché des émeutes » à Ispahan. En revanche, le journal réformateur Etemad a vu dans ces rassemblements le signe d’un « manque de confiance des manifestants à l’égard du gouvernement pour résoudre les problèmes ».
Les Etats-Unis, l’ennemi juré de l’Iran, se sont déclarés « profondément inquiets » de la « répression violente » contre des manifestants « pacifiques » à Ispahan, selon les termes du département d’Etat. « Le peuple iranien a le droit d’exprimer sa frustration et de tenir son gouvernement pour responsable. »
Jeudi, un accord a été conclu entre les agriculteurs de la région d’Ispahan et les autorités au sujet de la distribution de 50 millions de mètres cubes d’eau, selon Fars. D’après cette agence, une canalisation acheminant l’eau de la province d’Ispahan vers Yazd a été détruite, jeudi soir, par un bulldozer, ainsi que trois réservoirs d’eau. En conséquence, l’eau potable dans des localités de Yazd a été coupée.
Pays aride, l’Iran connaît une sécheresse chronique depuis des années, avec pour conséquences des inondations régulières provoquées par la combinaison du durcissement des sols et de précipitations plus ou moins violentes.
Source : Le Monde avec AFP