Sénégal : l’horizon toujours orageux

Le collectif Mouvement de défense de la démocratie (M2D) a appelé « à descendre massivement dans les rues » à partir de lundi.

Face à l'arrestation maintenue du député Ousmane Sonko, dont l'immunité a été levée, le collectif Mouvement de défense de la démocratie (M2D) – comprenant le Pastef, parti de l'opposant arrêté, des partis d'opposition et des organisations contestataires de la société civile – a décidé de lancer un appel à manifestations à partir de lundi. C'est peu dire que le Sénégal va au-devant de nouvelles journées à haut risque d'affrontements. Après avoir connu pendant trois jours ses pires troubles depuis des années, le pays habituellement considéré comme un îlot de stabilité en Afrique de l'Ouest et sa capitale Dakar ont connu une relative accalmie samedi, jour de relâche d'ordinaire. Des actes de saccage et de pillage ont cependant continué à être rapportés, dont de nombreux contre des enseignes françaises. La tension n'est donc pas retombée.  

Au-delà de Sonko, la libération des prisonniers politiques réclamée

Le collectif réclame « la libération immédiate de tous les prisonniers politiques illégalement et arbitrairement détenus », le rétablissement du signal suspendu de deux chaînes de télévision accusées d'avoir diffusé « en boucle » des images des troubles, et une enquête sur ce qu'il appelle un « complot » du pouvoir. Par ailleurs, le collectif, donnant lecture d'un communiqué dans les locaux du parti d'Ousmane Sonko, le Parti du Sénégal pour le travail, l'éthique et la fraternité (Pastef-Les patriotes), s'en est durement pris au président Macky Sall, qualifié « d'apprenti dictateur ». « Il a perdu l'autorité morale pour rester président », a dit un des leaders du mouvement, Cheikh Tidiane Dieye. Il s'en est tenu à ces mots quand la presse lui a demandé si le collectif appelait les Sénégalais à réclamer la démission de M. Sall, président depuis 2012. 

Les doigts sont pointés sur « un complot » contre l'opposant Sonko…

Quoi qu'il en soit, les manifestants croient au « complot » contre Sonko et expriment individuellement leur usure face aux épreuves quotidiennes et leur lassitude vis-à-vis du pouvoir. Dans la foulée, certains d'entre eux montrent du doigt la France, premier partenaire commercial du Sénégal, et perçue comme l'un des principaux soutiens étrangers de Macky Sall. Le Mouvement de défense de la démocratie, lui, ne s'est pas gêné pour désigner les « parrains étrangers » à qui Macky Sall s'emploierait à « faire plaisir ». Celui-ci, élu sur la promesse de mettre le pays sur la voie de l'émergence, a démenti fin février avoir quoi que ce soit à voir avec les ennuis judiciaires de M. Sonko. Il a depuis gardé le silence, mais la pression augmente pour qu'il prenne la parole. 

… mais le pouvoir se veut intraitable 

Samedi, c'est son ministre de l'Intérieur Antoine Félix Abdoulaye Diome qui a tenu un langage vigoureux. Il a appelé au calme et a fait miroiter « la perspective » d'un allègement du couvre-feu instauré contre la pandémie et qui pèse sur l'activité d'un grand nombre. Mais il a aussi dit que l'État emploierait « tous les moyens nécessaires » pour rétablir l'ordre. « Toutes les personnes auteures d'actes criminels seront recherchées, arrêtées, poursuivies et traduites devant la justice », a-t-il promis. La Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest (Cedeao) a appelé « toutes les parties à la retenue et au calme ». L'Union africaine a exprimé sa « préoccupation » et son attachement à une solution « par la voie pacifique, le dialogue et dans le strict respect de l'ordre ».

Source : le point

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