Covid-19 en Tunisie : vaccination gratuite pour tous les Tunisiens et les étrangers

Le professeur Hechmi Louzir, directeur de l’Institut Pasteur de Tunis et porte-parole officiel du Comité scientifique de la lutte contre le coronavirus, met en exergue les principaux points relatifs à la vaccination.

La Tunisie s'apprête à lancer sa première campagne de vaccination contre le coronavirus, dès l'arrivée du premier lot de vaccins à la mi-février, selon les autorités.

Une stratégie nationale de vaccination a été dévoilée, il y a quelques semaines. Le professeur Hechmi Louzir, directeur de l’Institut Pasteur de Tunis et porte-parole officiel du Comité scientifique de la lutte contre le coronavirus, met en exergue les principaux points relatifs à la vaccination, dans une interview accordée à l’Agence Anadolu.

La première question qui se pose est relative à l'efficacité du vaccin. Après la vaccination, peut-on quand même être contaminé et transmettre le coronavirus ?

Quand on fait une maladie, on développe une réponse immunitaire qui nous protège contre la maladie, ou encore de rattraper la même maladie. A un certain moment aucune preuve n'a démontré qu’on peut être protégé contre l’infection. Il y a une distanciation entre l’infection et la maladie. L’infection peut être un portage asymptomatique du virus. Les données les plus récentes semblent indiquer qu'une baisse est constatée après une infection naturelle ou après l'injection de certains vaccins.

Cependant, on peut continuer dans certains cas particulier à avoir le virus sans faire de maladie, donc, il y a toujours un petit risque de transmission. En général, on n’attrape pas beaucoup le virus comparé aux gens qui ne sont pas vaccinés ou qui n’ont pas fait la maladie. De ce fait, cette hypothèse n’est pas importante et elle n’est pas à généraliser.

Est-ce nécessaire de se faire vacciner si on a déjà attrapé la Covid-19 ?

En général, les gens qui ont été contaminés, qu’ils aient développé une maladie ou pas, ils sont protégés pendant huit à neuf mois. Donc, conclusion, ceux qui ont déjà eu la maladie peuvent ne pas se faire vacciner, ils sont normalement protégés. S’ils veulent se faire vacciner, il n’y a pas de risque particulier, comme ils ont déjà attrapé le virus.

Mais leur vaccination ne peut se faire qu’après trois mois de leur contamination.

Quelle est la durée de protection du vaccin ?

La médecine, basée sur les preuves, ne peut pas confirmer que le vaccin peut protéger jusqu' à deux ans alors qu’on a pas encore un recul de deux ans.

Je dirais, que le vaccin, très probablement, protègera un certain nombre d’année. Maintenant, il y a un risque de variation du virus, si le virus mute, notamment d’une façon importante, au niveau des antigènes qui sont la cible de la vaccination ainsi que de la réponse immunitaire, on n’est pas à l’abri, donc la vaccination ne va plus être protectrice dans un délai donné, une fois que le virus a muté.

Les femmes enceintes ou qui allaitent peuvent-elles se faire vacciner ?

Il n’y a pas de données très précises sur ce point, parce que les femmes enceintes ou les femmes qui allaitent n’ont pas été incluses dans les essais cliniques de phase 3, c’est pour cela, d’ailleurs, que le vaccin n’est pas indiqué à la femme enceinte. Ceci dit, il y a eu, lors de la campagne de vaccination de masse aux États-Unis et en Europe, des femmes, enceintes sans le savoir, qui se sont fait vacciner en parallèle.

Des spécialistes sont en train de suivre l’évolution de la grossesse et les éventuels risques. Pour le moment, il n’y a pas encore de données ni de résultats, concernant une complication particulière ou contraire, un suivi est en cours, on espère avoir des résultats, dans quelques mois, par rapport à cette question.

Les personnes vaccinées seraient-elles toujours obligées de porter un masque ?

D’abord, les personnes vaccinées ne peuvent être protégées qu’au bout d’un certain temps, un mois à peu près. Il faut un mois après le début de la vaccination pour considérer qu’on peut être protégé. Ce sont les données de protection publiées.

Le port du masque se justifie par la première question. Le vaccin risque de ne pas protéger contre l’infection, donc il y a un petit risque -même si on est vacciné- de pouvoir héberger le virus et éventuellement de le transmettre. Dans ces conditions, en attendant d’avoir plus d’éléments concrets par rapport à l’éventuelle protection du vaccin contre l’infection, il vaut mieux continuer de porter le masque.

Est-il nécessaire de se faire vacciner chaque année ?

Ça dépend de l’évolution du virus, si le virus ne mute pas, il reste sensible à la réponse immunitaire développée par la vaccination, à ce moment-là, on n’aura pas besoin de nous faire vacciner régulièrement, à moins que l’immunité serait perdue avec le temps.

Les vaccins, sont-ils efficaces contre les nouvelles souches ?

Ils sont efficaces contre un certain nombre de souches à partir du moment où les variations dne sont pas très importantes, ou bien quand les variations ne touchent pas les gènes qui codent pour la protéine, qui est la cible de la réponse immunitaire. A ce moment, on a des souches qui vont accumuler des mutations pouvant se transmettre. Si la souche s’éloigne un peu trop de la souche initiale surtout dans la partie qui code pour les antigènes entre autres l’antigène la protéine Spike.

Les souches émergentes risquent, donc, de ne pas être reconnues par la réponse immunitaire induite par la vaccination et à ce moment-là cela constituerait un problème. Il faut faire un autre vaccin, il y aurait également les risques de réinfection et de maladie chez les gens déjà vaccinés.

Existent-ils des vaccins plus efficaces que d’autres ?

L’efficacité se calcule, elle se résume en pourcentage d’efficacité, il y a des vaccins efficaces à 95 %, d’autres à 60 %, à 70 % ou à 80 %, c’est un peu ça la différence. Mais en matière de vaccination, à partir de 70 % d'efficacité, il n’y a pas beaucoup de différence entre les vaccins.

Quelle est la stratégie vaccinale proposée par le ministère de la Santé pour les personnes prioritaires ?

Nous avons lancé une application permettant aux gens de s’inscrire à distance. Pour les personnes âgées qui ne sont habituées ni à utiliser Internet ni aux inscriptions à distance via les téléphones portables, elles peuvent se faire aider d’abord par leurs enfants, ou bien par leurs médecins ou encore par des gens qui peuvent les aider à s'inscrire.

Pour certaines catégories sociales et régionales, il y aura la possibilité de se faire vacciner exceptionnellement dans les centres médicaux de la région.

Les autorités sanitaires, ont-elles évoqué un point de relais pour la vaccination, comme les pharmacies par exemple ?

Non, pas dans les pharmacies, le vaccin va se faire dans des centres de vaccination bien identifiés, les gens déjà inscrits à distance vont recevoir un SMS indiquant où, quand, et à quelle heure vont-ils se faire vacciner, chacun dans le centre le plus proche de son adresse, c’est un peu comme pour les élections.

Une fois disponible sur le marché tunisien, peut-on choisir parmi les vaccins ?

En fait, le vaccin, nous allons le faire par campagne, au fur et à mesure que les doses arrivent. Chaque vaccin n'aura une autorisation de mise sur le marché, que s'il répond à la qualité, à l’efficacité et à l’innocuité requises. Les gens, on va leur proposer le vaccin disponible au moment de la campagne, ils seront convoqués conformément à la stratégie et à la priorité.

Pour les gens qui ne sont pas présentés à l'heure, il y aura la possibilité de faire des rattrapages.

Il y aura toujours un seul vaccin dans les centres de vaccination.

Le vaccin, serait-il un jour obligatoire ?

Le vaccin est volontaire pour le moment, il n’est pas obligatoire, il est gratuit pour tous les Tunisiens et tous les résidents en Tunisie. Les non-tunisiens aussi, ils seront traités au même titre que les Tunisiens, en termes de priorisation qui va dépendre de l’état de santé, de l’âge, etc. D’ailleurs, à ma connaissance, ce vaccin n’est obligatoire dans aucun pays au monde.

Par ailleurs, le ministère tunisien de la Santé a mis à la disposition des citoyens un service SMS pour s'inscrire, en envoyant "evax" au 85355, ou en composant le code USSD *2021#, ainsi qu'un site web d’inscription https://www.evax.tn/ et un numéro vert, le 80 10 20 21 qui est opérationnel du lundi au vendredi de 9h à 17h. Il est destiné particulièrement aux personnes qui ne peuvent s’inscrire via Internet.

Source: AA

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