France: La campagne de promotion de la laïcité à l'école suscite un tollé

Une campagne de promotion de la laïcité à l'école, lancée par l'Exécutif français, continue de susciter un vif débat sur les réseaux sociaux, alors que plusieurs syndicats d'enseignants dénoncent un « dévoiement raciste » de la laïcité.

La campagne de communication lancée par le ministère de l'Éducation nationale et intitulée « C'est ça la laïcité », est composée de huit affiches qui seront diffusées dans les établissements publics dès la rentrée prochaine.

Introduites jeudi au cours de la conférence de presse annuelle de la rentrée par le ministre de l'Éducation Jean-Michel Blanquer, les affiches et leur sémantique réelle ou supposée, ont forcé ce dernier à réagir vendredi sur les ondes de la radio « RTL », déclarant que cette campagne « est faite pour unir ».

Les affiches présentent chacune des groupes de deux ou trois élèves, - « de vrais élèves, avec leurs vrais prénoms » -, selon le ministre.

Ces groupes d'élèves se trouvent dans différentes situations scolaires : en classe, à la récréation, à la bibliothèque, en cours d'éducation physique et sportive, etc. Chaque affiche est également composée d'un titre tel que : « Permettre à Sacha et Neissa d'être dans le même bain. C'est ça la laïcité », « Tout faire pour que Imrane, Axelle et Ismail pensent par eux-mêmes. C'est ça la laïcité », « Permettre à Milhan et Aliyah de rire des mêmes histoires. C'est ça la laïcité ».

Après leur partage, les critiques n'ont pas tardé à inonder les réseaux sociaux, certains internautes dénonçant notamment les « préjugés et clichés racistes » n'ayant « rien à voir avec la laïcité ».

L'antenne du syndicat « Sud Éducation » en Seine-et-Marne, a présenté jeudi sur Twitter, son analyse sémiotique des affiches.

Le syndicat a d'abord rappelé que « la laïcité, c’est la séparation des églises et de l’État, c’est aussi la neutralité religieuse de l’État et de ses agents dans l’exercice de leurs fonctions ». Notant également qu'« aucune des personnes présentées dans ces affiches n’est agent de l’État », mais qu'il s'agit d'élèves. « Sud Éducation » a estimé que « ces affiches ne parlent pas de laïcité, [mais] plutôt d'«intégration», de «multiculturalisme» et de «vivre ensemble» ».

Tout en poursuivant sa déconstruction sémiotique, le syndicat note dans un autre tweet, que « ces affiches présentent des enfants dans diverses activités [et] le fait qu’ils soient ensemble dans ces activités est présenté comme un effet de la laïcité [mais] quelque chose ferait donc obstacle sans la laïcité, mais quoi donc ? », interroge « Sud Éducation », avant d'ajouter que « les seules réponses possibles dans ces affiches sont : des couleurs de peau différentes et des prénoms d’origines diverses ». Le syndicat dénonce ainsi un « dévoiement raciste » de la laïcité par cette campagne de communication du ministère de l’Éducation nationale.

« Sud Éducation », estime que « ces affiches supposent que les origines des élèves (dont la couleur de peau et les prénoms sont ici des signes) empêchent le vivre ensemble et que la laïcité remédie à ce que l’affiche présente comme un problème ».

Le syndicat CGT « Éduc’action » a dénoncé pour sa part une « scandaleuse campagne du ministère sur la laïcité », fustigeant les « Poncifs et l’instrumentalisation d'un concept apparemment mal digéré... ».

« Nous ne pouvons que craindre le contenu des futures formations des personnels sur cette thématique », ajoute le syndicat enseignant.

Un hashtag « #cecalalaicité » s'est propagé sur Twitter suite au partage du contenu des affiches sur le site de réseautage social, un internaute notant que « La France et sa loi de 1905 furent jadis considérées par beaucoup, non sans raison, comme une source d'inspiration en matière de laïcité. Aujourd'hui, la France est dirigée par des fossoyeurs de la laïcité. La campagne #cestcalalaicite illustre bien cette dérive », a-t-il estimé.

« Empêcher ta maman de t'accompagner en sortie scolaire parce qu'elle porte le voile alors qu'on désespère d'avoir des parents volontaires et impliqués ? #CestÇaLaLaïcité », lançait jeudi un autre twitteur.

Un communiqué publié cette semaine par le ministère de l'Éducation nationale notait que « cette campagne fait le choix d’inscrire le récit de la laïcité dans le quotidien des élèves en s’appuyant sur ses effets concrets, incontestables et partagés, tels qu’ils les vivent tous les jours à l’école, au collège et au lycée ».

Invité vendredi matin à la radio RTL, suite au tollé suscité par la campagne, Jean-Michel Blanquer a fait part de son agacement, « N’allons pas chercher de nouvelle polémique. Cette campagne est faite pour unir et pour rappeler que la laïcité est au cœur du pacte social français et que nous devons tous la respecter », a affirmé le ministre.

Source : AA

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