Le Mexique poursuit des fabricants d’armes américains, une première

Le Mexique a intenté une action en justice « sans précédent » aux Etats-Unis contre les plus gros fabricants d’armes américains. Le ministre des affaires étrangères mexicain, Marcelo Ebrard, a annoncé, mercredi 4 août, qu’une plainte contre ces entreprises avait été déposée devant un tribunal fédéral de Boston (nord-est des Etats-Unis). Il a dénoncé un « commerce illicite » sur le territoire mexicain qui cause des « dommages directs » au pays.

« Nous sommes confiants dans la qualité juridique de ce que nous présentons. Nous allons plaider avec tout le sérieux nécessaire. Nous gagnerons ce procès et nous réussirons à réduire de manière drastique le trafic illicite d’armes au Mexique », a ajouté M. Ebrard lors d’une conférence de presse.

M. Ebrard a affirmé que « la participation d’un gouvernement mexicain à un litige de cette nature » devant un tribunal américain « était sans précédent », et que la démarche avait reçu l’aval du président, Andrés Manuel Lopez Obrador.

L’historien et analyste Lorenzo Meyer a confirmé qu’il n’y avait pas de précédent à une telle action du Mexique devant les tribunaux américains, bien qu’il ait peu d’espoir qu’elle se solde par un succès. « Une armée d’avocats va se dresser contre nous durant le procès. Je vois cela plus comme un acte symbolique, un élément destiné à faire pression » sur les fabricants d’armes et l’administration américaine, a déclaré Meyer à l’Agence France-Presse (AFP).

L’expert a rappelé que les demandes mexicaines s’étaient jusqu’à présent limitées à des revendications rhétoriques, notamment sous le gouvernement du président Felipe Calderon (2006-2012), qui avait lancé une offensive militaire antidrogue controversée.

Le gouvernement mexicain réclame un dédommagement

Parmi les entreprises accusées par le Mexique, figurent Smith & Wesson, Beretta, Colt, Glock, Century Arms, Ruger et Barrett, qui produisent plus de 68 % des plus de 500 000 armes introduites clandestinement au Mexique chaque année, selon les informations figurant dans la plainte mexicaine.

Le ministre des affaires étrangères a expliqué que l’action en justice visait à ce que les fabricants dédommagent le gouvernement mexicain pour les dommages causés par leurs « pratiques négligentes ».

La plainte demande également des mesures pour « surveiller et mettre au pas » les fabricants et les distributeurs d’armes.

M. Ebrard a même accusé les fabricants américains de développer des types d’armes spécialement pour les trafiquants de drogue mexicains : « C’est pour cela que ces armes sont faites : être achetées. »

Une requête soutenue par des avocats américains

Le trafic illégal d’armes figure au centre des relations bilatérales entre le Mexique et son voisin américain. Il constitue le principal marché des puissants cartels de la drogue. Plus de 17 000 meurtres commis au Mexique en 2019 ont impliqué l’utilisation d’armes importées illégalement des Etats-Unis, selon des données du gouvernement mexicain.

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L’équipe juridique du ministère des affaires étrangères est soutenue par les avocats américains spécialisés dans les droits civils Steve Shadowen et Jonathan Lowy, également impliqués dans la prévention de la violence armée.

Source: LeMonde 

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