Russie : l'opposant Alexeï Navalny condamné à deux ans et demi de prison

Le tribunal de Moscou a confirmé en appel sa peine de prison ferme, réduite de quelques semaines, pour violation d'un contrôle judiciaire.

 

Le principal adversaire du Kremlin, Alexeï Navalny, visé par de multiples procédures judiciaires, a été condamné samedi à deux ans et demi de prison en camp de travail par la justice russe. Le tribunal de Moscou a confirmé en appel sa peine de prison ferme pour violation d'un contrôle judiciaire. Le juge a toutefois légèrement réduit d'un mois et demi sa condamnation. Il risque d'être transféré en camp de travail, la plupart des peines d'emprisonnement en Russie étant effectués dans des camps pénitentiaires où le travail des détenus est obligatoire.

Ce jugement intervient alors que la Cour européenne des droits de l'Homme (CEDH) a demandé cette semaine la libération du militant russe anticorruption de 44 ans, arguant d'un risque pour la vie de cet opposant qui a survécu in extremis à un empoisonnement l'année dernière. Cette décision a été immédiatement rejetée par Moscou, qui avait déjà balayé les appels en ce sens de l'Union européenne, malgré la menace de nouvelles sanctions.

Revenu en Russie en janvier d'une convalescence après l'empoisonnement dont il accuse le Kremlin, Alexeï Navalny avait été arrêté dès son arrivée à l'aéroport et a écopé le 2 février de deux ans et huit mois d'emprisonnement. Le tribunal a converti une peine de prison avec sursis pour fraude datant de 2014 en sentence ferme pour violation de son contrôle judiciaire. C'est ce jugement qui était étudié en appel samedi matin dans un tribunal de Moscou.

Présent à l'audience, l'opposant a rejeté cette accusation en disant n'avoir jamais voulu se dérober aux autorités russes en allant en Allemagne et les avoir averties de son retour. «J'ai acheté un billet et j'ai dit à tout le monde que je rentrais à la maison (...) C'est juste absurde», a-t-il affirmé à la juge, selon une journaliste de l'AFP présente au tribunal. Le procureur a rétorqué en affirmant que l'opposant avait «ouvertement et effrontément» défié la loi et qu'il souhaite qu'on lui reconnaisse un droit d'autorisation «exclusif».

Par ailleurs, samedi après-midi, Alexeï Navalny comparaîtra devant une autre juge dans un procès pour «diffamation» d'un vétéran de la Deuxième guerre mondiale. Le Parquet a requis dans ce dossier 950.000 roubles d'amende (10.600 euros environ) et réclamé lui aussi que le sursis de l'opposant soit converti en prison ferme. 

Héritage de l'Union soviétique, la plupart des peines d'emprisonnement en Russie sont effectuées dans des camps pénitentiaires situés parfois loin de tout. Le travail des détenus, habituellement dans des ateliers de couture ou de fabrication de meubles, y est obligatoire. Les conditions de détention y sont aussi régulièrement dénoncées par les défenseurs des droits humains.

Multiples procédures

Alexeï Navalny, dont l'incarcération en janvier avait conduit à trois journées de manifestations réprimées par la police, dénonce des procédures judiciaires montées de toutes pièces et a passé les audiences précédentes à défier la cour. Selon lui, le Kremlin veut le jeter en prison pour le faire taire, après avoir échoué à le tuer en l'empoisonnant l'été dernier. Moscou rejette ces accusations.

D'autres affaires sont en cours. La justice russe est notamment saisie d'une plainte en diffamation déposée contre Alexeï Navalny par le sulfureux homme d'affaires Evguéni Prigojine, réputé proche du président Vladimir Poutine. Une enquête pour escroquerie le vise aussi, un dossier en cours d'instruction dans lequel la peine maximale encourue est de 10 ans de prison.

L'Union européenne et les États-Unis ont multiplié les appels à libérer Alexeï Navalny, tandis que les collaborateurs de l'opposant ont exhorté les Occidentaux à sanctionner de hauts responsables russes et proches de Vladimir Poutine. Moscou y voit une «ingérence» dans ses affaires et a menacé les Européens de représailles. Alexeï Navalny et ses partisans comptent organiser de nouvelles manifestations contre le pouvoir au printemps et à l'été, à l'approche d'élections législatives.

Source : le figaro

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