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- Le 22 Novembre 2024
"L'ennemi ne passera pas !", lance le commandant Ivan Glouchtchenko au milieu d'un paysage d'un blanc immaculé. Sur cette base ultra-moderne, au fin fond de l'Arctique russe, les forces de Moscou se préparent à faire face à l'Otan.
Dans cette région stratégique, riche en hydrocarbures et amenée à jouer un rôle croissant dans le commerce mondial à la faveur du changement climatique et de la fonte des glaces, les intérêts du Kremlin s'opposent à ceux de plusieurs autres pays, dont les Etats-Unis.
Avant le sommet du Conseil de l'Arctique, qui se tiendra jeudi et dont la Russie prendra la présidence tournante, l'armée russe a donné accès à un groupe de médias, dont l'AFP, à sa base du "Trèfle Arctique" sur l'archipel François-Joseph.
Ici, à 600 kilomètres à peine du pôle Nord, les soldats de Moscou sont installées pour rester et entendent le faire savoir: sur un territoire de plus de 14.000 mètres carrés, ils ont construit, sur les ruines de vieux sites soviétiques, un complexe capable de fonctionner en autarcie pendant près d'un an et demi.
La base est équipée d'une station d'épuration et de chauffage de l'eau, d'une centrale électrique, mais aussi d'une clinique, d'une salle de sport, d'un cinéma, d'un sauna et d'une église. Le tout est relié par des tunnels chauffés permettant aux quelque 150 militaires de ne pas avoir à sortir dans le froid polaire, sauf nécessité.
"Nous pouvons comparer ce complexe à une station spatiale, la seule différence étant qu'il ne se trouve pas en orbite mais dans le désert arctique", se félicite le général Igor Tchourkine, l'un des commandants de la flotte du Nord qui occupe les lieux.
Balayée par les vents et soumise à des températures pouvant descendre jusqu'à -42°C, la base comprend aussi un aérodrome géant, d'où ont décollé en mars deux chasseurs MiG-31, parvenant à franchir le pôle Nord avant de revenir sur l'archipel.
Les officiers de cette installation militaire, la plus au Nord au monde, se vantent aussi de leur système de défense côtière Bastion, d'une portée de 360 kilomètres et qui a montré sa "fiabilité" dans les conditions météorologiques extrêmes de l'Arctique, selon le commandant Balabek Eminov.
Car dans cette région stratégique, les contentieux n'ont fait que se renforcer ces dernières années entre forces armées, la Russie comme l'Otan multipliant les manoeuvres et affichant ouvertement leurs ambitions.
Ivan Glouchtchenko, l'un des officiers de la base, raconte ainsi que ses hommes ont repéré la veille un avion de reconnaissance norvégien, qui s'est approché à une centaine de kilomètres sans pour autant violer la frontière. Les Russes ont réagi en envoyant un appareil pour "l'accompagner" quelques heures.
"Les forces armées américaines et celles de l'Otan ont pris l'habitude de conduire des manoeuvres régulières dans l'Arctique. On avait pas vu ça depuis la fin de la Seconde guerre mondiale", souligne Alexandre Moisseïev, le commandant de la flotte du Nord.
S'exprimant depuis un croiseur nucléaire dans le port de Severomorsk, ville fermée de l'Arctique, il dénonce les "actions provocatrices" de Washington dans la région, ses vols de bombardiers stratégiques aux frontières russes et ses sous-marins en mer de Barents et au large de la Norvège, membre de l'Otan.
La Russie a très largement renforcé sa présence militaire dans la région ces dernières années, la base du "Trèfle Arctique" n'étant que le dernier maillon en date. Moscou déploie notamment des systèmes de défense anti-aérienne dernier cri, les S-400.
C'est que le Kremlin espère y devenir la première puissance militaire et économique, profitant des retombées financières du passage du Nord-Est, route maritime entre l'Europe à l'Asie qui se développe avec le recul des glaces.
Le chef de la diplomatie russe, Sergueï Lavrov, a ainsi martelé lundi que l'Arctique était une zone d'influence légitime de Moscou et dénoncé "l'offensive" occidentale dans la région. Il doit rencontrer jeudi son homologue américain en marge du sommet du Conseil de l'Arctique.
Pour les soldats du "Trèfle Arctique", les incursions étrangères se limitent pour l'instant à celles d'ours polaires. En deux ans et demi, l'officier Sergueï Mourzaïev raconte en avoir croisé trois.
Source : AFP