Vladimir Poutine met en garde ceux qui seraient tentés de « franchir une ligne rouge avec la Russie »

Le président russe s’exprimait mercredi matin, lors son discours annuel à la nation, dans un contexte de multiples passes d’armes avec les Occidentaux.

La police russe a procédé, mercredi 21 avril, à des raids visant les partisans d’Alexeï Navalny, avant des manifestations destinées à soutenir l’opposant emprisonné et à parasiter le grand discours annuel de Vladimir Poutine. Celui-ci intervient dans un contexte de tensions croissantes avec l’Occident au sujet du sort de son détracteur, hospitalisé en prison et dans un état critique selon ses proches, mais aussi du déploiement militaire russe près de la frontière ukrainienne et des relations délétères avec les Etats-Unis.

« J’espère que personne n’aura l’idée de franchir une ligne rouge avec la Russie. Mais nous déterminerons nous-même par où elle passe », a mis en garde le président russe. « Nous nous comportons dans l’ensemble avec retenue et de manière modeste, souvent ne répondant même pas aux actions inamicales, voire à des grossièretés flagrantes », a-t-il poursuivi. Selon lui, pour certains pays, « s’en prendre à la Russie pour tout et n’importe quoi est devenu une sorte de sport ». Il n’a cependant pas fait, dans ce discours, référence de façon précise aux gros dossiers l’opposant à Washington et à l’Union européenne.

M. Poutine a en outre dénoncé le silence des Occidentaux sur ce qu’il a présenté comme une « tentative de coup d’Etat » en Biélorussie, où le dirigeant Alexandre Loukachenko a assuré avoir déjoué un assassinat le visant. Il a soutenu qu’en Occident « tout le monde prétend qu’il ne se passe rien du tout »« Que se serait-il passé si la tentative de coup d’Etat avait été effectivement entreprise ? Combien de personnes auraient souffert ? », a-t-il poursuivi, regrettant par ailleurs la « pratique des sanctions illégales à motivation politique ».Lutte pour le pouvoir d’achat

Sur le plan intérieur, il a déclaré viser une immunité collective contre le Covid-19 en Russie à l’automne, saluant la « véritable percée » scientifique de son pays avec la création de trois vaccins. Notant la « retenue » de ses compatriotes, qui ont « respecté des mesures de précaution épuisantes », il les a appelés à se faire vacciner, alors que la campagne d’immunisation connaît des lenteurs en Russie, sur fond de méfiance de la population. Le président a également dit vouloir « garder toutes les frontières sous contrôle pour ralentir la propagation » du virus.

M. Poutine a, en outre, fixé la croissance des revenus comme l’une des grandes priorités des autorités, annonçant notamment une série d’aides financières aux familles avec enfant. Alors que le pouvoir d’achat des Russes est en berne depuis des années et a subi les effets de la pandémie, le président a demandé au « gouvernement de former les conditions de long terme qui permettront, avec l’aide de mécanismes de marché, des prix prévisibles », sur fond de hausse des prix alimentaires ces derniers mois.

Des élections législatives sont prévues pour septembre. Si M. Poutine reste populaire, son parti, réputé corrompu, ne l’est guère. Selon le baromètre de l’institut Levada de mars, les intentions de vote pour La Russie unie sont à 21 %.

Perquisitions dans une vingtaine de villes

En parallèle, le mouvement de M. Navalny, en grève de la faim depuis trois semaines pour dénoncer ses conditions de détention, a appelé à des manifestations : plus d’une centaine de villes sont concernées, de Vladivostok à Kaliningrad, en passant par Moscou, Saint-Pétersbourg et Vladimir, dans la région où l’opposant est incarcéré.

« Il ne s’agit plus seulement de la liberté de Navalny, mais de sa vie », avait souligné samedi son allié Leonid Volkov. Ses avocats l’ont jugé « très faible » mardi et ont réclamé un transfert dans un hôpital civil moscovite.

Des perquisitions ont déjà visé des locaux liés à l’organisation de l’opposant dans une vingtaine de villes mardi et mercredi, selon l’ONG spécialisée OVD-Info. De premières interpellations ont également eu lieu mercredi, à l’instar de celle de Lioubov Sobol, figure de l’opposition moscovite, et de la porte-parole de M. Navalny, Kira Yarmysh.

Le ministère de l’intérieur avait prévenu qu’il prendrait « toutes les mesures » nécessaires en réponse aux manifestations non autorisées. Le précédent mouvement de contestation, après l’arrestation en janvier de M. Navalny, avait donné lieu à plus de 11 000 arrestations. En outre, dès la semaine prochaine, la justice doit examiner une demande du parquet visant à classer comme « extrémistes » les organisations liées à l’opposant, ce qui exposerait tous ces militants à de lourdes peines de prison.

Source : Le Monde avec AFP

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