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- Le 22 Novembre 2024
Dans le quartier prioritaire de Maurepas, le secteur le plus pauvre de la ville de Rennes au nord-ouest de la France, Babacar Gueye, un Sénégalais de 27 ans, est pris d'une crise d’angoisse, dans la nuit du 2 au 3 décembre 2015, avant de s'auto-mutiler avec un petit couteau de cuisine.
Un de ses amis a appelé les secours, mais ce sont 8 policiers, qui débarquent dont 4 agents de la BAC (Brigade anti-criminalité), armés de tasers, de matraques télescopiques et d’armes létales.
Lorsqu'ils sont entrés dans le bâtiment, l'un des policiers a abattu Babacar de cinq balles. Il meurt menotté au terme d’une agonie d’une heure.
Quelques heures plus tard, les policiers présents sur les lieux ce soir-là, tentent de le rendre responsable de sa propre mort en portant plainte contre lui pour « tentative d'homicide volontaire sur personnes dépositaire de l'ordre public ». Les policiers ont décrit Babacar Gueye comme « un homme particulièrement agressif », selon des médias locaux.
La mort de Babacar a déclenché d'énormes manifestations pour réclamer justice et vérité et dénoncer les abus de la police en France.
Une enquête a été diligentée par le parquet de Rennes pour « tentative d'homicide volontaire sur personne dépositaire de l'ordre public » et après plusieurs années de procès, le Tribunal de grande instance de Rennes a classé l'affaire, concluant que le policier avait « agi en état de légitime défense et doit dès lors être déclaré irresponsable pénalement du chef de meurtre ».
La famille Gueye, qui se bat toujours pour que justice soit rendue, a qualifié son combat devant la presse locale de « lutte contre la violence et le racisme d'Etat, de ses forces de l'ordre, de sa justice, de ses prisons et de ses centres de détention ».
La police française : une longue histoire de brutalité et de racisme
Yasser Louati, analyste politique français et défenseur des droits humains, actuellement à la tête du « Comité français Justice et Libertés pour tous » (CJL), a déclaré à Anadolu que la police française a une longue histoire de violence à l’endroit de la population civile, avec peu ou pas de contrôle, « sans parler des sanctions ».
Selon lui, il faut jeter un regard historique sur la genèse de la police française. La loi du 23 avril 1941 « portant organisation générale des services de police en France » publiée dans le Journal Officiel de l’Etat français du 6 mai 1941, aurait été préparée en collaboration avec la Gestapo (police politique de l'État nazi, ndlr) ».
On constate depuis, que la vocation de la police n'est pas celle de « préserver, servir et défendre les valeurs françaises pour protéger la population civile, mais de discipliner et punir », a-t-il ajouté.
Selon Louati, les membres des minorités musulmanes, arabes et noires sont brutalement interpellés et souvent abattus par la police, aussi bien dans la rue que dans les commissariats.
Cependant, malgré une longue histoire de violence, de racisme et plusieurs études qui pointent la sensibilité d'extrême droite dans les rangs de la police, le gouvernement ne semble pas prêt à agir pour reconsidérer la relation de la police avec la population en général, souligne Louati.
« En fait, nous voyons les choses évoluer vers le pire : moins de transparence, moins de responsabilité et un pouvoir écrasant est donné à la police avec peu ou pas de contrôle », a-t-il ajouté.
Le président du « Comité français Justice et Libertés pour tous », a fait observer que chaque fois qu'un musulman croise la route de la police française, sa « vie est en danger ».
Une personne de confession musulmane est plus susceptible d'être arrêtée et battue par la police. Par conséquent, elle risque davantage de mourir aux mains de la police, a-t-il déclaré.
Selon une enquête du Défenseur des droits datant de 2017, les noirs et les arabes ont 20 fois plus de risques d'être victimes de profilage racial par la police.
Selon le média français d'information en ligne indépendant « Basta », 746 personnes sont décédées entre 1977 et 2020 à la suite d’une intervention de la police en France, dont 61 femmes et 82 enfants de moins de 18 ans.
Sur 444 personnes tuées par balles, 253 n'étaient pas armées, tandis qu'une personne sur 10 est décédée pour cause d’asphyxie, indique le média « Basta ».
« Ce n'est pas le moment opportun pour être noir, arabe ou musulman en France, surtout avec cette police » qui a vu le jour sous un gouvernement fasciste, a déclaré Louati.
Adama Traoré : Le « George Floyd français »
Louati a souligné que les élites françaises sont prêtes à dénoncer le racisme et les violences policières aux États-Unis ou ailleurs, mais paradoxalement elles n'ont plus de leçon à donner « quand on voit ce qui se passe en France ».
Par exemple, depuis que George Floyd a été tué par un policier aux États-Unis il y a quelques années, « nous avons vu un bon nombre d’experts dans les médias, de droite comme de gauche, et des membres du gouvernement dénoncer le racisme et les violences policières aux Etats-Unis ».
Ils ont cependant appelé à des manifestations contre le racisme et les violences policières en France, a déclaré Louati, ajoutant que les autorités françaises refusent de regarder en face la réalité du racisme systémique dans l’Hexagone et surtout comment des institutions, comme la police, deviennent racistes et violentes.
« On n'a pas vu les membres du gouvernement soutenir les familles des victimes de violences policières lorsqu'elles portent l'affaire devant la justice, car il est politiquement plus profitable de soutenir la police que de la remettre en cause, et c'est là où réside l’hypocrisie », a-t-il ajouté.
En 2016, un Malien de 24 ans nommé Adama Traoré, surnommé le « George Floyd français », est mort en garde à vue dans la région parisienne.
Les similitudes entre le sort d'Adama Traoré et celui de George Floyd démontrent des parallèles frappants entre les violences policières et les troubles en France et aux États-Unis.
Les deux hommes noirs sont morts aux mains de la police et ont subi un plaquage ventral avant de mourir, qui les a empêchés de respirer normalement.
Leur mort brutale est devenue le signe de ralliement dans le monde entier de ceux qui se battent contre le racisme et les violences policières.
Source : AA