La Cour pénale internationale (CPI) de La Haye a émis le 17 mars dernier un mandat d'arrêt à l'encontre du président russe Vladimir Poutine et le commissaire aux droits de l'enfant russe Maria Lvova-Belova. Le Kremlin à qualifié cette decision d'insignifiante" et dénuée de sens. Notre rédaction analyse les conséquences de la décision.

Il existe de nombreuses preuves publiques de déportation illégale d'enfants des territoires occupés de l'Ukraine vers la Russie, écrit le New York Times, c'est pourquoi des avocats familiers avec l'affaire ont récemment déclaré qu'ils attendaient un mandat d'arrêt. Le commissaire aux droits de l'enfant Mme Maria Lvova-Belova a parlé à plusieurs reprises de l'envoi d'enfants ukrainiens en Russie. Il y a un mois, la télévision d'État a diffusé une conversation entre Poutine et Belova durant laquelle il a été declaré que le nombre d'appels des citoyens russes pour l'adoption d'enfants des territoires occupés de l'Ukraine été en augmentation. Du point de vue du droit international, le déplacement d'enfants des territoires occupés est un crime de guerre.

Quelle est la prochaine étape ?

123 pays ont signé le Statut de Rome de la CPI, visiter donc l'un ces pays devient aujourd'hui dangereux pour le dirigeant russe, mais selon Denis Krivosheev, directeur adjoint pour l'Europe de l'Est et l'Asie centrale d'Amnesty International, il est aussi risqué pour Poutine de voyager dans des pays qui n'ont pas encore ratifié ce statut, car ils seront tentés de le livrer à la Cour Internationale. 

L'ordre de la CPI fait de Poutine un paria et il risque d'être arrêté à l'étranger, convient Stephen Rapp, ambassadeur americain qui a dirigé le Bureau de la justice pénale internationale du département d'État américain.

Cependant, les décisions de la CPI n'ont pas toujours été mises en œuvre. Le tribunal a inculpé le président soudanais Omar Hassan al-Béchir en 2009, mais ce dernier, bien qu'avoir voyagé, n'a pas été arrêté.

Signal à Pékin et à Washington. Harold Koch, professeur de droit international à la faculté de droit de Yale, a déclaré au NYT que ce mandat d'arret non seulement isole Poutine, mais empêche également la Chine de fournir des armes à la Russie. En outre, il réduira la résistance de l'armée américaine contre le transfert à la CPI de preuves de crimes de guerre russes recueillies aux États-Unis.

Aussi, selon The Guardian, la CPI envoie un signal aux hauts responsables militaires et civils russes qu'ils pourraient également être jugés et cela limitera leur capacité à voyager à travers le monde.

L'ordonnance de la CPI démontre que "les chefs d'État et les chefs militaires ne peuvent pas commettre de crimes de guerre avec une garantie de ne pas etre tenus responsabilites", a déclaré Michael Newton, professeur de droit à l'Université Vanderbilt, au Wall Street Journal.

La CPI ne peut pas être limitée à deux mandat. Krivosheev dit que jusqu'à présent, le mandat n'a été délivré que pour un seul crime, mais la décision du tribunal d'aujourd'hui ne sera pas la dernière. "Il y a toute une liste de crimes bien documentés, de sorte que la liste des suspects augmentera", a déclaré le représentant d'Amnesty. La veille, la Commission d'enquête des Nations Unies sur les violations en Ukraine a publié un rapport sur les crimes de guerre pendant la guerre, y compris les meurtres délibérés, l'emprisonnement illégal et la torture.

Un coup porté à la diplomatie russe. Les pays qui soutiennent la CPI et qui font partie du Statut de Rome devront repenser leurs relations avec la diplomatie russe, a déclaré l'ancien diplomate russe Boris Bondarev. "Il est difficile d'imaginer que d'une part, Poutine est accusé de crimes graves, et d'autre part, Scholz ou Macron négocient personnellement avec lui ou avec la délégation qu'il a autorisée. Il est possible que la prochaine étape en termes de bon sens soit de le déclarer le président illégitime, mais la question se pose alors : qui est le chef légitime du pays ? » Dans le même temps, le président chinois Xi Jinping n'arrêtera pas la décision de la CPI, et il visitera la Russie en mars avec une visite d'État, estime Bondaryev.

Poutine arrivera-t-il à La Haye ? Selon le New York Times, la CPI fonctionne ainsi : tout d'abord, le procureur (dans cette affaire, Karim Khan) présente des preuves de la culpabilité d'un panel présumé de trois juges à l'étape de l'enquête préliminaire, après quoi un mandat d'arrêt est délivré. Après cela, la personne recherchée doit être traduite en justice et ce n'est qu'alors qu'elle doit effectuer le pré-procès, puis les audiences principales ont lieu en premier.

Ainsi, si le suspect parvient à éviter l'arrestation, l'audience pour confirmer les accusations n'aura pas lieu. Cela signifie qu'une peine par contumace n'est pas possible. Cependant, lorsque le mandat d'arrêt international de Milosevic a été émis, peu ont cru en la réalité de sa détention, mais deux ans plus tard, le chef de l'ex-Yougoslavie a été arrêté et envoyé à La Haye.

F.L pour Maghreb Aujourd'hui